Un policier a été placé sous le statut de témoin assisté après avoir tiré à cinq reprises et abattu Babacar Guèye, un Sénégalais de 27 ans, à Rennes, en décembre 2015, a appris nos confrères de l’AFP vendredi auprès du parquet de Rennes.
«Le policier tireur a été entendu par le magistrat instructeur sous le statut de témoin assisté. Il n’a donc pas été mis en examen», a indiqué à l’AFP le procureur de la République, Philippe Astruc.
Babacar Gueye, un Sénégalais sans papiers, était hébergé chez un ami, lorsqu’il est pris d’une crise d’angoisse au milieu de la nuit du 2 au 3 décembre 2015, s’emparant d’un couteau de table. Les pompiers appelés par l’ami arrivent avec huit policiers. Faute de pouvoir le maîtriser avec un taser défectueux, la scène se poursuit dans l’escalier, où un policier, membre de la Bac, tire à cinq reprises. Babacar est ensuite menotté au sol et décède malgré les soins prodigués.
Une enquête ouverte par le parquet pour «tentative de meurtre sur personnes dépositaires de l’autorité publique» a été classée sans suite en juillet 2016, tout comme une enquête de l’IGPN, la police des polices. La famille a déposé plainte avec constitution de partie civile en janvier 2017 et une information judiciaire a été ouverte peu après. «Il existe des indices graves et concordants qui auraient mérité une mise en examen du policier», a déclaré à l’AFP Gwendoline Tenier, avocate de la famille, qui dénonce un «deux poids deux mesures» quand des policiers sont mis en cause.
Selon Me Frédéric Birrien, avocat du policier, ce dernier a agi «en état de légitime défense, alors que le taser était défectueux et les matraques inopérantes» face à un homme en proie à des «bouffées délirantes qui avançait sur lui avec un couteau». «Le statut de témoin assisté signifie que les indices graves et concordants ne sont pas réunis», a-t-il ajouté, soulignant qu’il «n’y a pas de parapluie judiciaire à Rennes pour les fonctionnaires de police qui dérapent».
Par ailleurs, au cours de l’expertise balistique, les experts ont constaté la disparition de l’arme du policier. Le scellé «a été détruit par erreur en 2018», a confirmé à l’AFP le procureur. «Lors d’une opération de tri des scellés du tribunal opérée en 2018, les scellés, considérés par erreur comme étant relatifs à une affaire classée sans suite, ont été détruits», indique-t-il, précisant que «cette erreur, pour très regrettable qu’elle soit, ne devrait pas avoir de conséquences significatives sur la manifestation de la vérité». Pour Me Tenier, il s’agit «d’une erreur grave, qui n’aurait pas dû arriver dans le cadre d’une information judiciaire pour des faits de nature criminelle».
AFP