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Tu veux coiffer, ma chérie?

Un petit tour à Château d’Eau, le quartier africain dans le 10e arrondissement de Paris, ça vous tente? C’est toujours truffé d’anecdotes, notamment dans les salons de coiffure. Suivez-nous…

Samedi midi. J’accepte d’accompagner ma copine Rachel dans un salon de coiffure dans le 10e arrondissement de Paris. Métro : Château d’Eau. Cela fait plusieurs mois que je n’y ai pas mis les pieds pour la simple raison que j’ai décidé de me coiffer dans des salons moins ghettoïsants, plus professionnels. J’y retrouve les magasins de mèches et de postiches, de produits de beauté… Et tous ces salons d’où sortent parfois des clones de la chanteuse américaine Nicki Minaj, connue pour ces extravagantes perruques colorées.

A peine sorties du métro, nous sommes happées par une vague de rabatteurs. « Tu veux coiffer ma chérie ? On te fait ton tissage tout de suite, 30 euros » ; « Manucure, ma belle ! 15 euros ! », promettent ces jeunes hommes dont le look ferait fuir une mamie des quartiers chics : casquette vissée sur la tête, pantalon baggy, baskets tendance, jean et ceinture de marque. Ici, la contrefaçon se mêle au vrai sans fausse note. Bien qu’inoffensives, les nombreuses sollicitations de ces rabatteurs ne vous donnent qu’une envie : trouver refuge dans le premier salon venu.

Laissant derrière nous les boutiques aux noms aussi évocateurs que prometteurs tels « Beautés d’Afrique », « La Belle dame », nous atterrissons chez « Glamour coiffure(*) » où ma copine est prise en mains par Blanche, une jolie callipyge d’à peine 30 ans. Cette Ivoirienne nous apprend qu’elle travaille dans ce salon depuis quatre ans et que son rêve est d’en ouvrir un à Grigny, en banlieue parisienne. Mais pas facile d’économiser avec ce qu’elle gagne par mois. A peine 500 euros malgré de longues heures passées à tresser de nombreuses clientes. Le propriétaire ne lui reverse que 30% de ses prestations. C’est juste pour élever sa fille, payer son loyer et en envoyer un peu à sa mère « restée au bled ». Blanche ne se plaint pas pour autant, « Mon mari est généreux », souligne-t-elle.

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Au fil des tresses, la coiffeuse nous raconte ce bouillonnant quartier « africain » au cœur de Paris. Elle nous parle des rabatteurs parmi lesquels « Hortefeux a fait le ménage ». « Ceux qui sont restés ont pour la plupart leurs papiers », affirme-t-elle. Durant l’ère Sarko, « la police en a embarqué plein », poursuit la volubile jeune femme.

« Maintenant le quartier est plus calme mais on a quand même peur des descentes. Ils arrivent toujours à en choper. Alors quand t’es sans-papiers, il vaut mieux faire attention ou aller bosser ailleurs ! »

Peu effrayée par la tignasse de ma copine -deux autres coiffeuses l’ont rejointe pour gagner deux heures sur les cinq requises pour le modèle de Rachel-, Blanche continue son bavardage tout en se mêlant aux autres conversations. Leurs participants tentent tant bien que mal de dominer le très bruyant N**gas in Paris de Kanye West et Jay-Z qui sert d’ambiance musicale.

 

Soudain, apparaît une mama en boubou avec un cabas rempli de plats africains. « Attiéké, N’dolè, Tchep », lance notre vendeuse ambulante à la cantonade. A ces mots magiques se constitue, en un temps record autour d’elle, un groupe de coiffeuses dignes d’un concours de « Miss plantureuse ». A sa bonne humeur, on comprend que son business marche plutôt bien. En effet, toute la journée, cette dame écume les dizaines de salons du boulevard Strasbourg proposant des plats cuisinés à petits prix aux employés et aux clients. Un business qui sied à ce quartier populaire.

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Contrairement à ses collègues, Blanche ne s’arrête pas pour déjeuner. Elle « préfère terminer vite ». Ce qui lui permettra d’avoir une autre cliente dans la journée et de gonfler son maigre salaire. Après trois heures dans cette ambiante survoltée, vient enfin l’heure de passer à la caisse. « Va voir Dolce pour payer les 60 euros », conseille Blanche à Rachel. Une « fashion victim » trône effectivement à la caisse, avec des lunettes de soleil et un jean signés Dolce & Gabbana. L’origine de son surnom ne fait plus mystère. « CB ou espèces, ma jolie? », susurre notre Apollon qui a dû être vigile sur l’avenue Montaigne dans une vie antérieure. Rachel lui tend un billet de 100 euros dont il vérifie l’authenticité, avant de lui rendre la monnaie. Parce qu’au pays des postiches, on n’aime pas les faux.

 

Source : Huffpost

 

 

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