Réfugié sous les halles du parking des Carmes, Sylvain, 39 ans, s’emmitoufle dans sa couverture rouge. Cela fait maintenant trois ans qu’il n’a plus de logement.
Alors qu’il était maçon, il s’est retrouvé à la rue après s’être séparé de sa compagne à cause de ses problèmes de toxicomanie. Depuis, il a plusieurs fois fait appel aux centres d’hébergement d’urgence. «Quand il fait très froid, il n’y a jamais de place, tout le monde appelle en même temps. Pendant une ou deux semaines, j’appelais tous les jours mais je n’ai jamais trouvé de place. Quand c’est plein, c’est plein».
À l’accueil de jour du Groupe Amitié Fraternité (GAF), au bord du canal du Midi, tout le monde est accepté, on est y au chaud pour quelques heures. Georges a 43 ans, installé dans un canapé en cuir défraîchi, il pianote sur son téléphone.
Sénégalais, il est arrivé en France le 4 mai 2017. Depuis, il dort à la rue, du côté de la gare. «Au début, j’appelais souvent le 115 pour la nuit mais à chaque fois ils me répondaient qu’il n’y avait pas de place. Donc j’ai fini par abandonner.»
Cet ancien militaire de l’armée gouvernementale sénégalaise a combattu contre les rebelles de Casamance, sa région d’origine. «Après avoir quitté l’armée, je ne pouvais pas rester car j’ai reçu des menaces de mort. Je n’ai plus aucune nouvelle de ma famille.» Avec l’aide du GAF, Georges a fait une demande d’asile en novembre dernier.
«En décembre, on m’a répondu qu’il n’y avait plus de conflit dans ma région et que je pouvais rentrer.» Le 6 janvier dernier, 14 hommes ont été assassinés en Casamance, probablement par des rebelles. Alors Georges ne repartira pas. «Ici, je me sens chez moi. J’y viens tous les jours depuis trois mois et l’après-midi, je fais du sport.» Il espère toujours obtenir l’asile en France, trouver du travail et un logement mais pour le moment, il n’a que ce canapé et un bout de trottoir le soir.
Dans une pièce à part, face à la fenêtre, Stéphane peint la mer, avec son chien à ses pieds. Gardien de propriété à Montauban, il a vécu une mauvaise expérience. «Un accident de parcours», dont il ne dira rien de plus. Depuis quelques mois, il est hébergé par le GAF aux Sept-Deniers, une chance qui lui laisse la possibilité de rebondir. Et il ne manque pas de projets.
«Je veux monter mon entreprise de peinture en bâtiment, retrouver un logement. Je suis très motivé.» Chacun a ses projets, ses espoirs et désespoirs mais aucun ne croit qu’un jour, tout le monde aura un toit au-dessus de la tête. Comme le dit Naomi, en CDD insertion au GAF, «des gens à la rue, il y en a toujours eu et il y en aura toujours.»
E.C.