En moins d’un mois, trois études sont venues faire le point sur les avancées en matière de diversité ethnique dans l’accès à l’emploi. Toutes disent que le bilan est mauvais.
Sur la diversité, les études se suivent et, malheureusement, disent toutes la même chose. Publiée par la Direction des études du ministère du Travail (Dares), l’enquête Trajectoires et Origines (TeO) passe au crible le devenir professionnel des jeunes issus de l’immigration.
Et le constat est sans surprise :
« les jeunes âgés de 18 à 29 ans immigrés ou descendants d’immigrés rencontrent à la fin de leurs études plus de difficultés d’insertion professionnelle que les autres jeunes. »
UNE INSERTION DANS L’EMPLOI PLUS CHAOTIQUE
Plus précisément, explique la Dares, « alors que les personnes non issues de l’immigration ont passé depuis la fin de leurs études près de 77 % de leur temps en emploi de façon continue pendant au moins un an, ce n’est le cas que de 68 % des descendants d’immigrés et de 69 % des immigrés ».
Inversement, immigrés et descendants d’immigrés ont passé 11,2 % et 12,7 % de leur temps en chômage durable, contre 9,6 % pour les jeunes non issus de l’immigration.
Une situation qui s’explique sans doute par un niveau scolaire plus faible au bas de l’échelle. Ainsi, 13,2 % des descendants d’immigrés et 23,5 % des immigrés avaient quitté l’école sans diplôme, contre 7,4 % pour les 18-29 ans non issus de l’immigration.
À l’autre bout de l’échelle des diplômes cependant, 17,8 % des jeunes immigrés ont un niveau d’étude égal ou supérieur à Bac + 3, soit plus que les jeunes descendants d’immigrés (15,5 %) mais aussi plus que les jeunes non immigrés (16,7 %).
UNE SITUATION ENCORE PLUS COMPLIQUÉE DANS LES ZUS
De plus, « l’insertion est encore plus difficile » pour les jeunes résidant en zones urbaines sensibles. Ainsi, « les jeunes immigrés des ZUS n’ont passé en moyenne que 59 % du temps depuis la fin de leurs études en emploi durable et les jeunes descendants d’immigrés 57 % », le taux restant faible (63 %) aussi pour les jeunes non issus de l’immigration.
Le constat est le même dans l’étude du Conseil économique social et environnemental (Cese) sur « l’apport économique des politiques de diversité à la performance de l’entreprise : le cas des jeunes diplômés d’origine étrangère » qui liste l’ensemble des enquêtes mesurant l’écart d’insertion.
UN ÉCART DE 21 POINTS QUAND ON A DES PARENTS VENUS DU MAGHREB
Sont rappelés notamment les chiffres de l’Insee qui montrent que le taux d’emploi des hommes français de 16 à 35 ans entre 2005 et 2009, qui est de 86 % quand les deux parents sont français de naissance, descend à 65 % quand au moins l’un des parents est originaire d’un pays du Maghreb.
L’écart demeure mais descend à 7 points pour les diplômés de niveau égal ou supérieur à bac + 5, l’Insee évaluant à 6 points la part « inexpliquée » et donc possiblement liée à de la discrimination pure dans cet écart.
Pour réduire cet écart, rappelle le Cese, les entreprises, souvent opposées à des mesures contraignantes, se sont lancées dans des opérations volontaires, dont la Charte de la diversité, lancée en 2004 et signée depuis par 3 000 entreprises ou établissements publics.
LA LÉGISLATION SUR LES STATISTIQUES ETHNIQUES VALORISE PEU LES EFFORTS
Mais, regrette, l’auteur, Sonia Hamoudi, « force est de constater que l’objectif de la Charte, à savoir l’accès de l’entreprise aux jeunes diplômés issus de l’immigration à des postes de responsabilité, n’a pas été atteint ».
En matière de diversité, les entreprises ont en effet plutôt porté leurs efforts sur l’âge, le sexe ou le handicap, où le résultat des efforts est plus facile à mesurer, plutôt que sur la composition ethnique, où la visibilité de ces efforts est faible du fait de l’interdiction des statistiques ethniques et de la très faible notoriété des outils alternatifs de mesures de la diversité.
C’est aussi la conclusion à laquelle aboutissait, à la mi-septembre, l’étude baptisée « Dix ans de politique de diversité, quel bilan ? ». Dans cette note, l’Institut Montaigne notait que « les politiques de lutte contre les discriminations et de promotion de la diversité se confrontent à la difficulté qu’ont les employeurs de mesurer l’efficacité de leurs actions », et plaidait pour « la levée de cette invisibilité statistique ».