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Emigration irrégulière: quand le Sénégal persiste dans sa politique «d’enlisement»

Face à la récurrence du phénomène de l’émigration irrégulière qui fait l’actualité ces derniers temps, notamment depuis l’annonce de la disparition d’embarcations en provenance de Kafountine au large des Iles Canaries (Espagne), le Sénégal semble opter pour la continuité dans sa stratégie de contrer ce «fléau» qui continue de décimer la jeunesse.

Intensification des contrôles au niveau des zones et sites potentiels de départ, déploiement de dispositifs de surveillance, de sensibilisation et d’accompagnement des jeunes à travers le renforcement des actions publiques multisectorielles de lutte contre l’émigration clandestine, voilà l’approche étatique qui, jusque-là, a montré ses limites.

«Le Chef de l’Etat a demandé au Gouvernement d’intensifier les contrôles au niveau des zones et sites potentiels de départ, mais également de déployer l’ensemble des dispositifs de surveillance, de sensibilisation et d’accompagnement des jeunes à travers le renforcement des actions publiques multisectorielles de lutte contre l’émigration clandestine».

C’est le Chef de l’Etat, Macky Sall, qui a décliné ainsi, en résumé, la «politique» de son gouvernement pour venir à bout de l’émigration irrégulière et dissuader d’éventuels candidats au voyage incertain vers l’Eldorado Européen. C’était, jeudi 20 juillet 2023, en réunion hebdomadaire du Conseil des ministres qu’il a présidée au Palais de la République.

Il s’agit donc de mettre en alerte la Marine, appuyée par l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes (FRONTEX) et la Gendarmerie et les autres Forces de défense et de sécurité, dont les efforts innombrables n’auront jamais réussi à arrêter les jeunes candidats à l’«aventure» périlleuse vers l’Europe. En plus de la dissuasion et/ou la répression, Macky Sall mise aussi sur la sensibilisation et les politiques publiques développées et en cours à cet effet.

VISION SOCIETALE ET HUMANISATION DE L’EMIGRATION CONTRE LOGIQUE DE CRIMINALISATION ET RHETORIQUE DE LA PEUR
Déjà, à la suite de son prédécesseur, Me Abdoulaye Wade, l’actuel président de la République, Macky Sall, qui a initié le Plan Sénégal émergent (PSE) comme référentiel des politiques publiques n’a cessé de multiplier les approches, pour décourager les jeunes «aventuriers» et donner raison à ceux qui ont opté pour la réussite au Sénégal. En vain ! Parce qu’en lieu et place «d’une vision sociétale et d’humanisation de la question» la logique «d’une criminalisation et d’une rhétorique de la peur» mise en avant peine à prospérer.

Pis, les nombreux projets pour l’éducation et la formation des jeunes pour leur faciliter l’accès à l’emploi, avec la création d’une multitude d’agences et de programmes gouvernementaux sont perçus comme des moyens de caser une clientèle politique. Ce qui fait, qu’en fin de compte, «la situation de la majorité des jeunes ne change pas». Mettant à nu ces initiatives pourtant salutaires.

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Ainsi, entre autres explorations de ce régime, «Tekki Fii» («Réussir ici» en Wolof), un programme pour booster l’entrepreneuriat au Sénégal, développé pour contrer les vagues de départs irréguliers, peine encore à produire les effets escomptés. Lancé en mai 2017, il vise à «promouvoir l’emploi et l’insertion professionnelle des jeunes dans les zones de départ de migrants». A l’image de l’initiative d’accompagnement et de financement des migrants de retour.

Quid de l’accompagnement de l’Agence nationale de promotion de l’emploi des jeunes (ANPEJ), des financements de la Délégation générale à l’Entreprenariat Rapide des Femmes et des Jeunes (DER/FJ), créée par décret n°2017-2123 du 15 novembre 2017, de l’assurance auprès des banques du Fonds de garantie d’investissement prioritaire (FONGIP) et de la capacitation pour l’insertion du Fonds de Financement de la Formation professionnelle et technique (3FPT)? Il y a aussi le Programme d’urgence pour l’insertion socioéconomique et l’emploi des jeunes, «Xëyu ndaw ñi». Autant de politiques qui, force est de le constater, ne parviennent toujours pas à fixer ces jeunes candidats au départ chez eux.

JUIN ET JUILLET 2023, DEUX MOIS DE TRAGEDIES POUR LES MIGRANTS
Cette instruction du président de la République intervient moins d’une semaine après le chavirement d’une pirogue de migrants à Saint-Louis, le mercredi 13 juillet dernier. Le bilan de l’accident, survenu au niveau de la brèche de Saint-Louis, est d’au moins 18 personnes tuées et 4 autres rescapées dont un admis aux urgences du Centre Hospitalier Régional de Saint-Louis et 3 au niveau de l’infirmerie de la Base Navale Nord.

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Elle survient également à un moment où les Sénégalais attendent d’être éclairés par rapport à la polémique sur la disparition dans l’océan Atlantique de trois (3) embarcations parties de la côte sud du Sénégal (Kafountine), les 23 et 27 juin 2023. Selon l’organisation non gouvernementale espagnole Caminando Fronteras, ils transportaient 60, 65 et 200 migrants clandestins.

Soulignant que les garde-côtes espagnols poursuivent les recherches pour retrouver les 300 migrants irréguliers partis du Sénégal à bord de ces embarcations. Réagissant à cette information, le Ministère des Affaires étrangères et des Sénégalais de l’Extérieur (MAESE) s’est dit étonné.

Le département de Me Aïssata Tall Sall déclarera, à travers un communiqué, avoir «appris avec étonnement, la publication, sur les réseaux sociaux, d’informations faisant état de la disparition en mer d’au moins trois-cent (300) Sénégalais, candidats à l’émigration, dont les embarcations en provenance de Kafountine (Casamance) faisaient route vers les Îles Canaries… Il ressort des vérifications qui ont été faites, que ces informations, sont dénuées de tout fondement».

Toutefois, le MAESE reconnait qu’entre le 28 juin et le 09 juillet 2023, deux-cent soixante (260) Sénégalais en détresse ont été secourus dans les eaux territoriales marocaines. «Le Consulat Général du Sénégal dans la ville marocaine de Dakhla en relation avec les autorités marocaines compétentes a pris les dispositions nécessaires pour leur prise en charge et leur rapatriement dans les meilleurs délais», précise le MAESE.

Boubacar Seye, président de l’Ong Horizon Sans frontière, trouve de son côté que cette situation s’explique par l’absence de perspective des jeunes et une mauvaise gestion des politiques publiques de la part des tenants du pouvoir.

Ibrahima Diallo

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