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Comment Teranga Capital est devenu le premier fonds de capital-risque sénégalais

Comment Teranga Capital est devenu le premier fonds de capital-risque sénégalais

Dans un quartier résidentiel qui concentre les plus belles ambassades de Dakar, Omar Cissé et Olivier Furdelle ont fondé Teranga Capital, le premier fonds de capital-risque sénégalais. Sa mission est d’aider les petites entreprises sénégalaises à se structurer en leur apportant les liquidités qui leur font défaut, notamment au moment le plus crucial, celui de l’amorçage.

« Les banques d’ici ne prêtent pas aux entrepreneurs qui se lancent. L’absence de financement pour les petites entreprises constitue non seulement le maillon faible du paysage entrepreneurial sénégalais, mais c’est aussi un frein à l’activité économique en général », assure Omar Cissé.

Les deux associés ont fait le même constat :

« Il manquait au Sénégal un outil structuré qui permette aux entreprises de grandir plus rapidement et devenir compétitives. »

Un temps évoqué, l’idée de créer à Dakar un club de « business angels » sénégalais capable d’investir des petits tickets a été rapidement écartée : « Ce type d’approche est en fait trop informel et insuffisamment structurant. Et les investissements décidés au coup par coup, sur des tickets relativement modestes ne permettent pas de couvrir les frais de gestion pour un accompagnement de qualité. Il y a aussi un problème de gouvernance à prendre en compte, par exemple en cas de retrait ou de non-implication des “business angels”. »

Ce sera donc un fonds de capital-risque, un choix précurseur au Sénégal. L’idée de le monter remonte à 2011, à l’époque où Omar Cissé se trouvait encore à la tête du CTIC Dakar, le premier incubateur de start-up technologiques du Sénégal. C’est durant cette période qu’il rencontre Olivier Furdelle, un consultant belge qui a vécu dans plusieurs pays d’Afrique et s’est spécialisé sur le financement des start-up et des PME africaines.

« Omar Cissé avait pour lui une très forte expertise de l’accompagnement, avec tous ces entrepreneurs qu’il rencontrait au CTIC Dakar, se souvient Olivier Furdelle. Je suis quant à moi spécialisé dans l’ingénierie financière ainsi que dans les levées de fonds. Or pour réussir, un fonds d’investissement dédié aux PME doit réunir ces deux composantes essentielles : l’ingénierie financière et l’accompagnement d’entrepreneurs. Si l’approche est purement financière, cela ne fonctionne pas. Il faut bâtir un vrai projet de développement à cinq ans avec les sociétés dans lesquelles nous investissons. »

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Patiemment, les deux associés visent les sociétés sénégalaises à fort potentiel pouvant entrer dans le « scope » du futur fonds.

« Nous n’avions pas encore d’existence juridique, mais nous avons néanmoins activé tous nos réseaux en leur demandant de nous sourcer les meilleures boîtes », assurent les deux associés. En parallèle, ils partent à la recherche de partenaires institutionnels et financiers pour constituer le premier tour de table du futur fonds qui sera généraliste et couvrira plusieurs secteurs, des TIC à l’agroalimentaire en passant par la santé.

En 2013, les choses s’accélèrent : le fonds français Investisseurs & Partenaires (I & P), déjà très actif en Afrique, veut monter un partenariat avec eux.

« Traditionnellement, I & P est plutôt tourné vers le financement des plus grandes entreprises, c’est-à-dire des projets nécessitant des gros tickets d’investissement, supérieurs à 450 000 euros. I & P voulait néanmoins se rapprocher de la cible des start-up et des TPE africaines », expliquent-ils. Structures dont les besoins en argent frais pour se développer les premières années ne dépassent pas les 300 000 euros.

« Notre problème au Sénégal est que les entreprises en amorçage, même prospères, sont souvent à la limite de l’informel, souligne Omar Cissé. La proximité est indispensable pour identifier les meilleurs deals. Même après investissement, il faut rester durablement sur place pour monitorer et accompagner les entrepreneurs. »

La grande force de Teranga Capital ? La promesse de fournir à chacune des entreprises investies près de 200 heures d’accompagnement, chaque année.

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I & P accepte très rapidement de se lancer dans l’aventure en devenant l’un des premiers souscripteurs de ce qui deviendra en 2015 Teranga Capital. Aux côtés d’I & P, plusieurs autres souscripteurs viendront rejoindre le tour de table, dont le Fonsis, le fonds souverain sénégalais, ainsi que plusieurs grandes entreprises sénégalaises et françaises spécialisées dans la finance, l’assurance ou les télécoms.

« Réduire les frais de fonctionnement »

Détail juridique important qui souligne l’ancrage sénégalais de Teranga Capital : la société d’investissement est domiciliée à Dakar… « Et non en Afrique du Sud ou à l’île Maurice, comme le font l’immense majorité des fonds d’investissement africains pour raisons juridiques ou fiscales, assure Olivier Furdelle. Nous avons déjà rencontré près de 150 sociétés sénégalaises avant même d’avoir sécurisé tous les financements auprès de nos souscripteurs, car nous voulions être prêts dès le début, pour commencer à investir le plus rapidement possible et ainsi réduire au maximum les frais de fonctionnement. »

Déjà six projets, dans tous les secteurs, sont en pleine « due diligence », le dernier stade avant l’investissement « en dur » dans le capital des entreprises, pour des tickets moyens compris entre 100 000 et 300 000 euros. Aujourd’hui, Teranga Capital est sur le point de soulever 3 milliards de francs CFA auprès de ses souscripteurs (4,6 millions d’euros), mis à la disposition des entrepreneurs sénégalais d’ici à 2020.

« Nous pensons qu’en septembre, nous pourrons officiellement commencer à investir et ainsi démarrer notre travail d’accompagnement sur le terrain », conclu Omar Cissé.

 

Samir Abdelkrim
chroniqueur Le Monde Afrique

 

 

 

 

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