Un patron de bar a voulu virer un client dont le comportement dérangeait. S’agissant du seul Noir présent ce jour-là, cela a été pris pour du racisme.
Ndaté Sylla est outré. Cet homme de 46 ans, franco-sénégalais, n’a pas l’habitude d’être traité ainsi. La nuit de samedi à dimanche, dans le pub lausannois Le XIIIe siècle, il a été emmené de force par le patron et un videur à l’écart des autres clients.
«Pourtant, je n’avais rien fait de mal! La seule chose qu’on puisse me reprocher, c’est d’avoir dansé seul, tout en souriant aux gens autour de moi.»
Quelques clients ont d’ailleurs tenté d’intervenir en sa faveur, dont une femme avec qui il avait discuté durant la soirée.
Mais Antoine Piguet, le patron, avance une toute autre explication: «Trois personnes sont venues se plaindre de son comportement. Apparemment, il se serait collé à plusieurs jeunes femmes, allant même jusqu’à caresser les fesses de l’une d’elles. Et je ne tolère pas ce genre de choses dans mon établissement», justifie-t-il.
Isabelle, l’une des femmes s’étant plaintes de Ndaté Sylla, abonde: «Durant une bonne partie de la soirée, il dansait seul, face à un mur. C’était bizarre, mais pas dérangeant. C’est après qu’il est devenu lourd, probablement à cause de l’alcool. Il s’est collé à moi plusieurs fois et a tenté de me prendre les mains à trois reprises. A chaque fois, je l’ai repoussé et il a fini par me toucher les fesses.»
«Interdit aux noirs et aux chiens»
Réfutant ces accusations et s’estimant innocent, Ndaté, seul Noir présent dans l’établissement ce soir-là, considère que c’était en réalité un acte raciste. Au grand dam d’Antoine Piguet: «C’est la première fois qu’un truc comme ça m’arrive. Si je n’avais pas réagi, on m’aurait accusé de cautionner le harcèlement sexuel et, en agissant, je suis passé pour un raciste. Entre MeToo ou le racisme, j’étais emmerdé quoi que je fasse», déplore le patron.
Finalement, c’est de son plein gré que Ndaté Sylla a quitté les lieux. Mais, en rentrant chez lui, fou de rage, il s’est fendu d’une publication cinglante sur Facebook. «Merci de mettre clairement un panneau: Interdit aux noirs et aux chiens», a-t-il notamment écrit.
Ce qui l’a le plus dérangé, c’est la facilité avec laquelle il a été jugé coupable. «Mettez-vous à ma place! Si vous êtes tranquillement en train de vous amuser et qu’on vous traite de la sorte, que feriez-vous? Ne voudriez-vous pas au moins savoir qui vous accuse? Eh bien même ça, on me l’a refusé. Je suis choqué, d’autant plus que je suis un client habituel. On aurait au moins pu me concéder le bénéfice du doute.»
Mais Antoine Piguet n’est pas de cet avis: «Il était hors de question de le confronter aux jeunes femmes. Il est important qu’elles puissent dénoncer le harcèlement de manière discrète. Il en va de leur sécurité.»
20mn.ch