Les juges de la cour d’appel de Fort-de-France ont débouté mardi plusieurs associations de leur requête en réparation et indemnisation des crimes de traite négrière et d’esclavage par l’État français. Ces associations, qui ont engagé depuis 2005 plusieurs démarches judiciaires de réparation, ont toujours été déboutées.
Dans leur arrêt qu’a pu consulter l’AFP, les magistrats ont confirmé pour l’essentiel un jugement du tribunal de Fort-de-France du 4 avril 2017. Ils ont constaté l’irrecevabilité des prétentions du Mouvement International pour les Réparations (MIR), une association anticolonialiste, et d’une personne physique, et débouté les demandeurs de l’ensemble de leurs prétentions.
La prescription des faits confirmée
Dans son arrêt, la cour d’appel a notamment confirmé la prescription des faits par rapport à l’action introduite. La décision souligne également que la loi Taubira de mai 2001, qui reconnaît la traite et l’esclavage comme crime contre l’humanité, avait clairement écarté le principe d’une réparation financière pour indemniser les descendants des esclaves.
Quarante-huit personnes physiques et trois associations avaient assigné l’État afin d’obtenir des réparations pour les crimes contre l’humanité que constituent la traite négrière et l’esclavage.
«Nous sommes plus que jamais déterminés», a réagi Garcin Malsa, le président du MIR Martinique. «La prochaine étape, c’est le pourvoi en cassation», a-t-il ajouté. Le MIR envisage de saisir à terme «la Cour européenne des droits de l’homme et des libertés».
La cour d’appel «s’inscrit dans la continuité du positionnement des juges français qui ne nous étonne pas», a observé Me Alain Manville, l’avocat du MIR auprès de la radio locale RCI. «L’État français n’échappera pas à son destin, à une mise en cause répétée jusqu’à obtention du droit à réparation», a-t-il prévenu.
«C’est une décision satisfaisante car elle répond très complètement à l’ensemble des arguments évoqués par les associations et les personnes physiques», a commenté de son côté Me Patrick Baudouin, avocat de la France dans ce procès. «Il va de soi que toute cette période a constitué une abomination épouvantable», mais «ce n’est pas devant le juge judiciaire que ce type d’action devrait être menée», a ajouté Me Baudouin.
Soulevée dès l’abolition définitive de l’esclavage en 1848 en France, la question de la réparation financière ne s’est concrétisée que pour les propriétaires d’esclaves qui ont alors été indemnisés au titre du préjudice subi. Rien n’a été versé aux 250.000 esclaves que comptait la France à la veille du décret d’abolition, dont près de 90.000 en Guadeloupe, 75.000 en Martinique, 60.000 à la Réunion et 12.000 en Guyane.