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9 « Noirs » sur 10 sont discriminés en France, selon Patrick Lozès président du CRAN

« 91 % des Noirs de France se disent discriminés dans la vie quotidienne. Cela signifie que la discrimination dans le pays est très importante et qu’elle concerne presque tous les Français noirs » (Patrick Lozès, président du CRAN)

Patrick Lozès, homme politique et militant français, affirme que, bien que 9 Noirs sur 10 déclarent être victimes de discrimination, le gouvernement ignore les problèmes causés par le racisme dans le pays.

Patrick Lozès, fondateur et président du Conseil représentatif des associations noires (CRAN), a évalué pour le compte d’Anadolu, le racisme et la discrimination auxquels sont confrontés les personnes de couleur en France dans la vie de tous les jours.

S’appuyant sur l’enquête menée par la société d’études indépendante Ipsos sur les Noirs en France, il explique : « D’après les dires des personnes interrogées, c’est qu’il y a des discriminations dans de nombreux domaines de la vie. 91 % des Noirs de France se disent discriminés dans la vie quotidienne. Cela signifie que la discrimination dans le pays est très importante et qu’elle concerne presque tous les Français noirs ».

Ces discriminations apparaissent en particulier lorsqu’ils cherchent un logement ou un emploi.

« Lorsque vous appelez et dites que vous voulez une maison, votre interlocuteur peut vous dire que la maison est disponible au téléphone, mais lorsqu’il se rend compte que vous êtes noir, il peut dire que la maison n’est pas disponible, et 5 minutes après cet incident, la maison peut être à nouveau disponible pour une autre personne qui appelle. Ou encore, dans la vie professionnelle, alors que tous vos collègues sont promus, vous ne pouvez pas l’être, même si les années passent. Dans les demandes d’emploi, vous envoyez votre CV et, quelques minutes plus tard, on vous informe que le poste est fermé. Cependant, le poste est toujours ouvert pour quelqu’un d’autre qui postule le même poste quelques minutes plus tard ».

Lozès souligne que la discrimination se manifeste également dans les services les plus élémentaires, tels que les transports publics, et affirme que certains Français pensent que « les Noirs devraient monter dans le bus ou le train après eux ».

Nombreux sont les préjugés
Affirmant que les Noirs ne sont pas suffisamment présents à l’Assemblée nationale française, aux postes de responsabilité dans l’armée ou aux postes de direction dans les entreprises, Lozès ajoute : « Il y a des préjugés à l’égard des Noirs. Les gens pensent que les Noirs ne sont pas assez talentueux. C’est une inhibition ».

Lozès a rappelé que Carlos Martens Bilongo, un député noir du parti LFI (La France Insoumise), avait été attaqué par des remarques racistes par le député d’extrême droite Grégoire de Fournas lors d’un discours à l’Assemblée nationale en 2022.

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« Pendant que Bilongo parlait, l’un des députés s’est écrié « Qu’il retourne à Afrique ». Est-ce qu’on peut dire ça à un député, à un député français ? S’il était blanc, personne ne pourrait faire ça. C’était absolument choquant, mais c’est exactement ce à quoi les Noirs sont confrontés dans la rue. Même lorsque vous êtes élu à l’Assemblée nationale, vos collègues au Parlement peuvent être racistes à votre égard. C’est scandaleux. Le gouvernement doit reconnaître que tout le monde n’est pas égal en France. Nous avons certainement de grandes valeurs en tant que pays. Je suis français, je suis fière de nos valeurs, mais elles doivent s’appliquer à tous, quelle que soit leur couleur ».

Des contrôles de police plus fréquents
Lozès affirme par ailleurs que la police française pratique le profilage ethnique des Noirs.

« Lorsque vous demandez aux Noirs ce qui se passe dans leur vie quotidienne, la plupart d’entre eux disent qu’ils sont contrôlés. Ils sont davantage contrôlés par la police que les autres. Je ne dis pas que tous les policiers sont racistes, mais nous devons accepter qu’il y ait du racisme au sein des forces de police, du racisme dans la façon dont ils parlent aux gens et dans la façon dont ils les traitent ».

« Nous ne devrions pas être victimes de racisme dans notre propre pays en raison de la couleur de notre peau. Ce n’est pas juste. Ce n’est pas juste pour ce pays que j’admire et que j’aime. Je voudrais que la France soit reconnue comme un pays où il y a de l’égalité dans le monde, pas du racisme », exprime-t-il en soulignant qu’il était injuste de criminaliser les Noirs en raison de leur couleur de peau.

Très peu de journalistes travaillant dans les médias français sont noirs
Abordant l’impact des médias sur la perception des Noirs, Lozès poursuit :

« Je ne comprends pas pourquoi les journaux ne détaillent les crimes commis uniquement lorsque c’est un Noir qui le commet. Ils insistent sur le fait que le crime a été commis par un Noir. Le crime est une chose terrible en soi, et il ne devrait pas être utilisé pour mettre en exergue le racisme. Les journaux devraient prêter attention au langage de l’information et ne pas ajouter du racisme au racisme. »

Lozès, fait remarquer que les médias français couvraient davantage les problèmes de racisme à l’égard des Noirs que par le passé.

« C’est absolument merveilleux que les médias parlent du racisme et donnent de l’espace à notre demande d’égalité, mais je veux leur demander « Regardez-vous, regardez vos entreprises, regardez les journalistes qui nous interviewent. Est-ce que tous vos employés sont blancs ? » Dans le journal le plus populaire, Le Monde, ou sur n’importe quelle chaîne de télévision, très peu de journalistes sont noirs. Je dis donc aux médias : C’est très bien de parler de racisme, mais d’abord vous devez vous regarder et vous corriger ».

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Le gouvernement ne peut répondre à nos questions sur le racisme
Notant que le plus grand problème en France est que les pratiques racistes et discriminatoires à l’encontre des Noirs sont ignorées, il poursuit: « Il est important que la France reconnaisse qu’il y a des discriminations dans le pays et qu’elle lutte contre ces discriminations, mais le gouvernement n’accepte pas qu’il y ait des problèmes de discrimination qui nuisent à la quasi-totalité des Noirs ».

« Lorsque nous demandons au gouvernement si les discriminations augmentent, nous ne pouvons pas obtenir de réponse. Ils ne peuvent pas répondre parce qu’ils n’ont pas de statistiques ethniques. Nous ne connaissons pas officiellement le nombre de Noirs vivant dans le pays. Nous ne disposons que de nos propres enquêtes, mais je pense qu’il est du devoir du gouvernement, et non d’une association, de déterminer la minorité ethnique dans le pays ».

Les médias s’intéressaient davantage à l’enquête dont je faisais l’objet qu’à mon acquittement
« Aujourd’hui, j’en ris, mais lorsque je me suis présenté à mon entreprise en costume pour la première fois, personne n’a pensé que j’étais le patron parce qu’ils ne sont pas habitués à voir des Noirs à des postes de direction », indique-t-il en expliquant qu’il a également été victime de discriminations tout au long de sa carrière.

Il rappelle qu’il avait quitté son poste de président du CRAN en 2011 pour se présenter à l’élection présidentielle en France, et qu’une enquête a été ouverte contre lui en décembre de la même année.

« La transparence est évidemment une des valeurs que nous devons reconnaître. Si vous êtes dans une position publique, vous devez accepter que vous puissiez faire l’objet d’une enquête. Personne n’est au-dessus de la loi et personne ne peut aller à l’encontre de la loi, mais la manière dont cette enquête a été menée était injuste. Si je n’avais pas été noir, l’enquête aurait été plus courte, mais elle a duré trop longtemps. Heureusement, j’ai été complètement disculpé. J’aurais espéré que l’issue de l’affaire soit aussi médiatisée que l’enquête, mais les médias étaient plus intéressés par le fait que je faisais l’objet d’une enquête que par le fait que j’ai été acquitté ».

Avec Anadolu

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