Les étrangers en situation irrégulière ont subi un enfermement «abusif», «disproportionné» et «sans discernement» dans les centres de rétention administrative (CRA) français en 2021, ont dénoncé jeudi 17 mars dans leur rapport annuel les associations qui leur viennent en aide.
«De nombreuses personnes ont été placées en centre de rétention administrative en 2021 sans le discernement indispensable devant nécessairement intervenir avant de décider d’une mesure de privation de liberté», ont écrit les cinq associations qui interviennent au sein des CRA. Ces associations, dont La Cimade ou France terre d’asile, ont également fait le «constat d’un enfermement trop souvent abusif et disproportionné».
En 2021, la France, premier pays européen en matière de délivrance de mesures d’expulsions (OQTF, obligation de quitter le territoire français), a enfermé 42.353 personnes en situation irrégulière dans l’attente de leur expulsion, dont 26.485 pour le seul CRA de Mayotte.
La durée moyenne d’enfermement a atteint les 22 jours en France métropolitaine, en hausse de 32%. Mais les défenseurs des migrants ont dénoncé l’«inutilité» de ces mesures, dans le contexte de fermeture de nombreuses frontières en 2021 en raison de la pandémie, ce qui a rendu nombre d’éloignements irréalisables. Cette augmentation, disent-ils, n’a ainsi pas conduit à expulser davantage, sans pour autant fournir de chiffres.
«Enfermer à tout prix»
Pour l’année 2021, le ministère de l’Intérieur n’a pas non plus rendu public le taux d’exécution des OQTF, sujet sensible qui met en difficulté le gouvernement, dont l’opposition dénonce régulièrement le laxisme en la matière.
Cette volonté d’«enfermer à tout prix» a également conduit à «l’apparition de nombreux clusters» de contamination au Covid-19 dans ces centres fermés, ont dénoncé les associations, là encore sans les dénombrer. «La logique d’enfermement l’emportant sur le strict respect des mesures barrières», ont-elles commenté.
Autre motif d’inquiétude: l’augmentation du nombre de personnes placées en CRA immédiatement après leur sortie de prison. Ils ont représenté 23,54% des entrants en centre de rétention. Une «double peine», ont encore déploré les associations.
Parmi ces personnes, le rapport recense de nombreux condamnés pour «délit de soustraction à l’éloignement», après avoir refusé de se soumettre aux tests Covid nécessaires à leur expulsion. L’année dernière, 10.091 personnes ont fait l’objet d’un éloignement forcé du territoire français, selon les statistiques du ministère de l’Intérieur.