Les djihadistes «ont mené des attaques terrifiantes et apparemment coordonnées contre des villages, massacrant des civils, pillant des maisons et détruisant des biens», a déclaré HRW.
Des groupes armés affiliés à l’organisation État islamique ont massacré des centaines de villageois depuis le début de l’année dans le nord-est du Mali de manière apparemment systématique, et les autorités n’en font pas assez pour protéger les civils, alerte Human Rights Watch (HRW) jeudi 27 octobre.
Des dizaines de milliers de villageois ont été poussées à fuir ailleurs au Mali ou vers le Niger voisin après avoir perdu leur bétail et tous leurs biens dans ces attaques commises depuis mars dans les régions de Ménaka et Gao, dit l’organisation de défense des droits de l’Homme dans un rapport.
«Attaques terrifiantes»
Elle souligne que les exactions ont en grande partie visé les Daoussahak, une tribu touareg. Elle souligne aussi que de vastes pans de territoire sont passés sous la coupe des groupes affiliés à l’organisation État islamique au grand Sahara (EIGS). Les djihadistes «ont mené des attaques terrifiantes et apparemment coordonnées contre des villages, massacrant des civils, pillant des maisons et détruisant des biens», dit HRW.
«Le gouvernement malien devrait faire davantage pour protéger les villageois particulièrement exposés aux risques d’attaques, et leur fournir une plus grande assistance», déclare une responsable de HRW, Jehanne Henry, citée dans un communiqué.
Tendance sécuritaire inversée
Ces propos contredisent ceux des militaires qui ont pris le pouvoir par la force en 2020 dans ce pays secoué depuis 2012 par la violence et la propagation djihadiste.
Les autorités maliennes se sont détournées depuis un an de l’allié français et de ses partenaires, et tournées vers la Russie. Elles répètent avoir inversé la tendance sécuritaire et avoir mis en débandade les groupes djihadistes.
Mercredi la sous-secrétaire d’État américaine Victoria Nuland, de retour du Sahel, avait déclaré que la sécurité s’était considérablement détériorée au Mali depuis que la junte a fait appel, selon les États-Unis et leurs alliés, aux mercenaires de la société russe Wagner en 2021.
Zone d’action élargie
HRW détaille, témoignages à l’appui, des attaques dans treize localités suivant un modus operandi similaire. À Inkalafane (région de Ménaka) le 28 mars, «un important groupe d’hommes armés est arrivé dans un véhicule armé et à moto».
Ils ont tué 35 civils, raconte un berger de 55 ans. La situation sécuritaire s’est largement détériorée depuis huit mois dans les régions de Ménaka et Gao suite à une offensive de l’EIGS au-delà de ce qui était alors sa zone d’action et d’influence.
Les djihadistes ont d’abord pris d’assaut l’immense et désertique région de Ménaka en mars et avril. L’EIGS a ensuite dirigé son feu plus à l’ouest, dans la région de Gao.
Des attaques ont été signalées autour de la capitale régionale, et pour la première fois une localité d’importance, Talataye, a été prise d’assaut et temporairement contrôlée par l’EIGS en septembre. HRW écrit que cette flambée de violence coïncide avec le retrait du Mali de la force antidjihadiste française Barkhane, poussée au départ par la junte.
Établir des bilans précis des victimes de ces assauts est extrêmement difficile en l’absence de remontées d’informations fiables en provenance de territoires largement inaccessibles.
La mission de l’ONU au Mali (Minusma) devrait quant à elle «intensifier ses patrouilles, ses vols de dissuasion et ses interactions avec les communautés touchées», dit HRW. La Minusma se plaint des entraves mises par les autorités maliennes à ses opérations.