En France, selon plusieurs sondages Marine Le Pen, présidente du Front National arrive en tête des intentions de vote au 1er tour de l’élection présidentielle. Aujourd’hui certains observateurs de la vie politique prédisent une possible victoire du parti d’extrême droite à ce scrutin. Une perspective qui inquiète les travailleurs immigrés et responsables associatifs.
Dans ce café près de la Porte de Vincennes, dans l’est de Paris, Abdoulaye Ba et Bakou Dembelé, deux ouvriers maliens vivant en France commentent les derniers sondages évoquant la présence du Front National au deuxième tour de l’élection présidentielle. Ils sont inquiets. Bakou Dembelé est en France depuis 7 ans. Après la fin de ces études, il a enchaîné les petits boulots dans les chantiers.
«Personnellement je crains pour le renouvellement de mon titre de séjour, parce que : est-ce qu’ils ne vont pas amener d’autres mesures beaucoup plus, restrictives auxquels je ne remplirais ces conditions. Moi je resterai jusqu’à ce ce qu’on me mette dans un avion pour rentrer chez moi », affirme M. Dembélé.
Le non renouvellement de la carte de séjour est l’une des principales craintes aussi d’Abdoulaye Ba, en France depuis 15 ans. Il travaille comme grutier dans un chantier.
« Pour l’instant, j’ai la chance, j’exerce un métier où il n’y a pas de chômage pratiquement, donc je n’ai pas besoin de contrats, de CDI, je travaille en intérim, je quitte un chantier et je vais sur un autre parce que c’est un métier qui est demandé. Mais je jour, ou on va conditionner l’obtention de ma carte de séjour à un contrat à durée indéterminée, ce jour-là, je suis éliminé. Du coup, on va se retrouver sans-papiers, et qui dit sans-papiers, dit sans droits. C’est vraiment inquiétant de ce point de vue-là », ajoute-t-il
Ces craintes sont-elles justifiées ? Selon le responsable du programme économique du Front National, Bernard Monot, en cas de prise de pouvoir, il y aura une limitation de l’immigration qui se ferait notamment en réduisant fortement le regroupement familial, l’accès au droit d’asile et l’immigration de travail. Pour le politologue, Jean-Yves Camus, spécialiste du Front National, les conditions de renouvellement de la carte de séjour vont se durcir pour les étrangers vivants en France.
« Quant au renouvellement de la carte de séjour, qui n’est pas, rappelons-le de plein droit, c’est à dire que l’administration a le pouvoir de la renouveler ou non, cela dépendra des instructions qui seront données à l’administration. Mais il me parait assez clair qu’un ministre de l’intérieur Front National fera en sorte de limiter au minimum le renouvellement des cartes. Cela me paraît assez clair que l’objectif, c’est de dissuader de toute façon dés le départ les étrangers de venir et faire en sorte que ceux qui sont déjà là reprennent entre guillemets volontairement le chemin entre guillemets de leur pays d’origine »
Pour Abdoulaye Ba, il est hors de question de quitter la France.
Guy Deballe est secrétaire national du Front National dans le 11ème arrondissement de Paris. Il affirme qu’il n’y aura pas de durcissement des conditions de renouvellement de la carte de séjour pour les travailleurs d’origine étrangère qui vivent depuis longtemps en France. La priorité, selon lui, est de limiter l’arrivée de nouveaux immigrés.
Lutter contre le Front National avec le peuple français, Aziz Abdelilah l’a vécu. D’origine algérienne, il est responsable d’une association de quartier basée à Toulon dans le Var, le Guynemer. Il s’est engagé dans le mouvement associatif lorsque le Front National a pris la mairie de Toulon en 1995 où le maire d’alors Jean-Marie Le Chevallier a tenté d’appliquer pendant 6 ans la politique de préférence nationale. Aziz Abdelilah a trouvé le soutien de beaucoup de Français dans son combat contre l’extrême droite.
« C’était la première ville Front National, plus grande ville Front National de France. C’est vrai qu’il y a eu de la crainte de la part des habitants et des citoyens des quartiers populaires de Toulon, mais en réalité toutes les autres institutions se sont bougées pour venir en aide à ces quartiers populaires. On a fait de la peine, à peu près à tout le monde en France et c’est vrai qu’au niveau culturel, au niveau des associations de proximité et d’autres institutions, on a vraiment été soutenu pendant ces six années »
Malgré l’inquiétude, Abdoulaye Ba et Bakou Dembelé sont optimistes sur la mobilisation en France contre le Front National. Ils se souviennent du 21 avril 2002 où Jean-Marie Le Pen avait atteint le deuxième tour de l’élection présidentielle. Des manifestations ont eu lieu pendant deux semaines.
Le 1er mai 2002, 1 million 500 mille personnes ont défilés dans les rues contre le Front National.
BBC Afrique