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Deux regards africains posés sur les collections du musée sur l’esclavage de Nantes

Deux regards africains posés sur les collections du musée sur l’esclavage de Nantes

Un artiste béninois et un historien ivoirien questionnent la responsabilité des Africains dans le processus colonial, n’hésitant pas à bousculer les discours convenus.

À partir du 19 mai, une exposition au château des ducs de Bretagne proposera deux regards africains, d’un artiste béninois et d’un historien ivoirien, sur les collections du musée d’Histoire de Nantes sur l’esclavage.

«L’objectif est de porter un regard neuf sur nos collections en décolonisant notre pensée», a expliqué, lors d’une visite de presse, Krystel Gualdé, directrice scientifique du musée et commissaire de l’exposition «Expression(s) décoloniale(s) #2».

La première édition de l’exposition s’était tenue en 2018 avec l’artiste congolais Moridja Kitenge. Organiser cet événement dans cette ville, qui fut le premier port négrier français avant l’abolition – définitive – de l’esclavage en 1848, est un symbole fort.

Jusqu’au 14 novembre prochain, la cour du château et les salles du musée accueilleront vingt pièces de l’artiste béninois contemporain Romuald Hazoumé, dont les oeuvres réalisées à partir de matériaux de récupération sont exposées dans le monde entier.

«J’ai le devoir, comme artiste, de dire aux miens qu’il faut prendre notre part de responsabilité dans l’histoire de l’esclavage pour faire notre résilience et régler les problèmes d’aujourd’hui, a déclaré le plasticien à l’Agence France-Presse. Il faut arrêter de dire que les Occidentaux sont les seuls responsables, car pour qu’il y ait des acheteurs d’esclaves, il fallait des vendeurs.»

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Des voix «peu entendues et acceptées»
L’historien ivoirien Gildas Bi Kakou a, pour sa part, été convié à commenter plusieurs pièces du musée à l’aune de ses recherches sur la traite négrière en Côte d’Ivoire, qui préexistait à l’arrivée des Européens.

«Cette recherche n’est pas encouragée en Afrique car elle gêne pour des raisons politiques et d’harmonie sociale», a indiqué le chercheur, auteur d’une série de cartels intitulés Un autre regard historique.

L’historien souligne que les esclaves venaient des côtes mais aussi de l’intérieur du pays, via les cours d’eau, avec l’appui de populations locales qui prélevaient un droit de passage, enchérissant le «coût» de l’esclave au fil de son trajet. «Les voix de cet artiste et de cet historien sont encore peu entendues et acceptées sur le continent africain», s’est navrée Krystel Gualdé.

Plusieurs oeuvres monumentales sont réalisées à partir de bidons utilisés dans le trafic d’essence frelaté entre le Nigéria et le Bénin. Transportés par des hommes au péril de leur vie, ils alimentaient jusqu’à peu la majorité du pays en essence.

Une autre pièce maîtresse, placée à l’entrée du musée, prend la forme d’un dé, formé par des tongs laissées par des migrants avant leur traversée mortifère en Méditerranée, et interroge sur le prix à payer pour obtenir une vie meilleure.

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