Sept migrants n’ont pas survécu à la traversée de l’océan Atlantique. L’un d’eux a été retrouvé mort lors d’une opération de sauvetage au large de l’île d’El Hierro, les cadavres des six autres ont été jetés par-dessus bord par les autres passagers, alors que l’embarcation, partie de Gambie, était encore en haute mer.
La route migratoire des Canaries n’en finit pas de produire des drames. Au moins sept passagers d’une pirogue, secourue mercredi 15 novembre dans l’après-midi, n’ont pas survécu à la traversée de l’océan Atlantique.
L’embarcation avait passé 15 jours en mer, dont trois à la dérive, au large d’El Hierro.
Elle a d’abord été repérée à 155 km de la petite île – la plus à l’ouest de l’archipel espagnol – par un voilier britannique. Son équipage a fourni de l’eau aux naufragés et est resté à leurs côtés jusqu’à l’arrivée du navire des secours espagnols. Les sauveteurs ont ensuite transféré 54 personnes dans leur bateau, ainsi que le corps sans vie d’un 55e exilé.
Six autres personnes sont mortes pendant la traversée en mer. Leurs cadavres ont été jetés par-dessus bord par les autres passagers, indique l’agence de presse EFE.
Les rescapés, eux, avancent que huit corps ont péri sur la route, a relayé Txema Santana, journaliste pour El Pais, sur X (ex-Twitter). D’après lui, 64 migrants au total ont pris la mer dans cette pirogue, partie de la ville de Kartong, en Gambie, à environ 1 650 km d’El Hierro.
Ce même jour, un autre « cayuco », mot espagnol désignant les embarcations de migrants sur cette route, a été secouru, avec 42 personnes à son bord. Toutes sont en bonne santé.
Le lendemain, jeudi 16 novembre, 222 exilés supplémentaires ont débarqué au même endroit : 59 hommes d’origine subsaharienne, secourus en haute mer puis ramenés à El Hierro par les secours à cause de l’état de délabrement de leur pirogue, et 163 autres personnes, escortées jusqu’au port principal de l’île, La Restinga. Parmi les passagers se trouvaient neuf femmes et deux fillettes.
Plus d’arrivées que durant la « crise des cayucos »
Cette année, de nombreux migrants cherchent à atteindre l’Europe via la traversée de l’Atlantique. Entre le 1er janvier et le 15 novembre, 32 436 migrants ont débarqué dans l’archipel espagnol, d’après le bilan du ministère de l’Intérieur publié le 16 novembre. Soit 118% de plus qu’en 2022. C’est plus, aussi, que le record établi en 2006, année dite de la « crise des cayucos », lorsque 31 678 personnes avaient débarqué aux Canaries.
S’exprimant jeudi devant les députés, avant d’être reconduit au pouvoir pour quatre années supplémentaires, le Premier ministre socialiste Pedro Sánchez a assuré que le gouvernement central faisait « tout pour répartir ces migrants » dans des centres d’accueil en Espagne continentale. Fin octobre, le gouvernement avait annoncé l’ouverture de 11 000 places d’hébergement supplémentaires dans le pays, pour soulager les structures des Canaries.
Les migrants seront installés pour un mois maximum, dans des casernes militaires désaffectées, des hôtels, des centres d’accueil et foyers de toute la péninsule ibérique.
Plus de 7 800 morts entre 2018 et 2022
Si de nombreux migrants parviennent à atteindre l’archipel espagnol malgré la dangerosité de cette longue traversée, beaucoup n’y survivent pas. Les décès à bord des pirogues ou les noyades, en cas de naufrage, sont régulières. Samedi 4 novembre, deux migrants sont décédés après leur hospitalisation dans un hôpital d’El Hierro. Deux autres ont été retrouvés morts à bord d’un canot par les sauveteurs.
Selon l’ONG espagnole Caminando Fronteras, qui s’appuie sur des appels d’urgence des exilés en mer ou de leurs proches, 778 migrants sont morts au premier semestre 2023 sur cette route, et plus de 7 800 migrants entre 2018 à 2022.
Tous cherchaient à quitter leur pays pour une vie plus décente en Europe. À l’instar de Pape Moussa Diouf, un jeune Sénégalais mort après son arrivée en Espagne, début novembre. Charpentier dans son pays, il a pris la mer pour « avoir une meilleur vie », raconte Txema Santana.
Plusieurs fois, il avait laissé sa place dans la pirogue qui s’apprêtait à partir « à des personnes plus nécessiteuses que lui ». Finalement parti du Sénégal et arrivé en Espagne, il y est mort d’une infection à la jambe qui s’est rapidement propagée à l’ensemble de son corps.
« Très aimé et apprécié », Pape Moussa Diouf a pu, avant de mourir, passer un appel vidéo à sa famille au pays. Il repose désormais dans un cimetière de la région. Sa pierre tombale, J15, est depuis plusieurs jours garnies de « fleurs fraîches » et de « bougies ».