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Un Français d’origine africaine ou maghrébine a moins de chance d’obtenir un crédit bancaire

Un Français d’origine africaine ou maghrébine a plus de risque que d’autres d’être victime de discriminations lors d’une demande de crédit bancaire: c’est la conclusion d’un « testing » inédit réalisé à la demande de la ville de Villeurbanne, présenté jeudi.

Si dans le cas d’une demande de crédit en vue d’une création d’entreprise, une différence de traitement envers les femmes a également été révélé par ce test, celle-ci se présente avec « moins d’acuité » que pour le critère « ethnico-racial », selon Éric Cédiey, le directeur d’ISM Corum, qui a réalisé l’étude.

Pour l’obtention d’un prêt immobilier, le test a mis en évidence que « l’homme supposé comme sans origine migratoire » était reçu plus longtemps, obtenait plus de conseils et d’informations et bénéficiait d’une offre plus attractive que le client « supposé comme d’origine subsaharienne ».

Quant au « créateur d’entreprise  supposé comme d’origine maghrébine, il n’a jamais reçu d’information sur le montant empruntable, ni sur le taux d’intérêt, ni sur la durée de remboursement conseillée (et a fortiori n’a jamais reçu de simulation) ». Celui-ci « est donc fortement pénalisé pour se projeter dans la suite de son projet », selon les conclusions du test.

Pour cet exercice, 90 tests ont été réalisés dans douze enseignes bancaires différentes de l’agglomération lyonnaise.

Courtier en assurances à Villeurbanne, Rachida Boukhari a raconté devant la presse comment elle s’était vu refuser en 2012 un crédit pour lancer son projet malgré « un dossier complet » et « un apport ». Face au refus de la banque, « tout s’écroule et on se pose toujours la question : pourquoi? ».

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« Contrairement à l’emploi et au logement, la discrimination dans l’accès au crédit est peu explorée dans notre pays », a estimé le maire PS de Villeurbanne, Jean-Paul Bret, commanditaire de l’étude.

« Il y a l’idée que les banques, menées par une logique uniquement économique, seraient à l’abri des discriminations et que l’obtention d’un prêt serait déterminée par des critères objectifs. Or, il s’avère que non », a-t-il poursuivi, dénonçant « l’opacité » des établissements de crédit.

La sociologue Djaouida Sehili, qui a participé au conseil scientifique de ce testing, a exclu que ces résultats soient le fruit de « défaillances individuelles ».

Condamner vigoureusement

Sollicitée par l’AFP, la Fédération bancaire française (FBF) a dénoncé « l’approximation de la méthode et la grande imprécision des résultats » de ce « testing ».

« Mais si certains cas de discrimination étaient avérés, nous ne pourrions que les condamner vigoureusement », a-t-elle ajouté.

« Nous demandons au Défenseur des droits, avec lequel nous avons un dialogue permanent sur ces sujets, un rendez-vous pour établir un diagnostic précis et travailler ensemble sur les points d’amélioration », a affirmé la FBF.

Selon la maire-adjointe, Agnès Thouvenot, lors d’une présentation en avant-première de ce « testing » aux représentants locaux de la FBF, ces derniers ont été « surpris » des résultats. « Ils ont reconnu que c’était une perte de chiffre d’affaires d’écarter des clients autant solvables que les autres », a-t-elle affirmé.

En 2008, la Haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde), remplacée depuis par le Défenseur des Droits, avait épinglé lors d’un testing trois entreprises – Accor, Crédit agricole et Mercuri Urval – pour des pratiques discriminatoires portant pour la première sur l’origine et pour les autres sur l’âge.

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Présent lors de la conférence de presse, le Défenseur des Droits Jacques Toubon a quant à lui dit à l’AFP qu’il comptait « prendre une décision cadre pour préconiser ce qu’il conviendrait de faire au niveau législatif et réglementaire » en la matière.

Les banques n’étant pas dans l’obligation de motiver leur décision, pour M. Toubon, « chaque fois qu’une décision n’est pas motivée, il y a la tentation de la prendre pour de mauvaises raisons ».

Déplorant « l’absence de discours national contre les discriminations depuis douze ou quinze ans », l’ancien Garde des Sceaux a plaidé pour la création d’un « Observatoire national des discriminations ».

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