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Soins des migrants : tout comprendre à la lutte contre le «tourisme médical»

PUMa, AME… Le gouvernement s’apprête à réformer l’accès aux soins des sans-papiers et des demandeurs d’asile. Un virage « irresponsable », selon le milieu associatif.

Malgré les alertes du milieu associatif, Edouard Philippe va annoncer mercredi une refonte de l’accès aux soins des migrants. Objectif : lutter contre les abus du système et notamment ce qu’on appelle le « tourisme médical ».

Ce phénomène, déjà identifié en 2014 par le Parisien mais jusqu’ici très peu documenté, n’est « clairement pas marginal ». C’est en tout cas la principale conclusion du très attendu rapport de l’Inspection des Affaires sociales (IGAS), publié ce mardi après-midi.

Selon de premières fuites, le Premier ministre compte ainsi introduire un délai de trois mois avant que les demandeurs d’asile puissent bénéficier de la Protection universelle maladie (PUMa). Certains actes non-urgents, relevant de l’Aide médicale d’Etat (AME), pourraient aussi faire l’objet d’un accord préalable de la Sécurité sociale.

La PUMa, nid à touristes médicaux ?

Commençons par redéfinir les contours de ces deux dispositifs qui recouvrent deux réalités différentes. La PUMa, anciennement appelée Couverture maladie universelle (CMU), correspond en fait à la sécurité sociale de base. Les demandeurs d’asile peuvent y prétendre dès le dépôt de leur demande.

Selon la ministre de la Santé Agnès Buzyn, la piste des trois mois de carence a pour but de décourager les migrants en provenance de Géorgie et d’Albanie. Ces derniers, expliquait-elle fin octobre en commission parlementaire, « sont a priori des pays sûrs » et « viennent en France dans le but spécifique de se faire soigner ».

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À l’heure actuelle, il n’existe aucun chiffre officiel sur les fraudes et les « dévoiements » de la PUMa. Tout juste sait-on que ce système aurait coûté près de 200 millions d’euros en 2018, selon l’IGAS.

L’AME, « le milliard le plus scruté de la dépense publique »

L’Aide médicale d’Etat est de son côté une prestation destinée aux sans-papiers, c’est-à-dire à tous les individus résidant sur le territoire français sans titre de séjour depuis au moins trois mois. On y trouve donc ceux qui ont été déboutés d’une demande d’asile, où qui n’en ont jamais fait la demande. Il est possible de la demander chaque année sous conditions de ressources, excepté les mineurs qui y ont droit sans condition.

Les associations d’aide aux migrants l’appellent ironiquement « le milliard le plus scruté de la République ». Car elle coûte en 2019 près de 934,9 millions d’euros, soit 0,6 % des dépenses de santé de l’Etat. 318 000 personnes en « profitent » actuellement. C’est deux fois plus qu’à son lancement, mais 12% seulement des bénéficiaires y auraient réellement recours.

Ce programme donne accès, sans avance de frais, à un panier de soins de base et d’urgence bien plus réduit que le PUMa. Un rapport parlementaire de 2015 estimait que 70 % des frais étaient liés à des maladies graves, comme la tuberculose ou le VIH, et certains accouchements.

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Malgré les incessantes intox, relayées un temps par le patron de LREM Stanislas Guérini, les prothèses mammaires, les cures thermales ou encore les aides à la procréation médicalement assistée n’en font pas partie. Le remboursement est en outre très faible sur les lunettes ou encore les prothèses dentaires.

Un virage « irresponsable » selon Médecins du monde

À ce sujet, Agnès Buzyn cible à nouveau les « personnes pratiquant […] le tourisme médical ». Et non, dit-elle, « les migrants de la porte de la Chapelle ni, plus généralement, des personnes qui fuient leur pays ou des immigrés venant d’Afrique ».

Selon les associations sur le terrain, ces réformes risquent pourtant de dégrader une situation « déjà insupportable », notamment dans les camps insalubres aux portes de Paris. « Ce que je sens, c’est que les sans-papiers et les demandeurs d’asile vont être encore plus suspectés de fraude, exclus et invisibilisés. Et cela risque au final de surcharger les urgences, qui n’ont vraiment pas besoin de ça », redoute auprès du Parisien Patrick Bouffard, membre du conseil d’administration de Médecins du monde.

Ce médecin cardiologue parisien pointe le risque de propagation de maladies contagieuses sur le territoire, et les coûts supérieurs qu’impliquerait un séjour tardif à l’hôpital plutôt qu’une prise en charge par la médecine de ville. Il regrette un choix « purement politique et totalement irresponsable en termes de santé publique ».

 

Le Parisien

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