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Petit bout de Sénégal à Paname

Dans les foyers parisiens les immigrés sénégalais restent connectés.

Voilà bientôt quarante ans, qu’il a quitté les rives du fleuve Sénégal pour tenter l’aventure sur les bords de la Seine. Trente neuf années de sa vie que Diouga Dabo a passées entre les quatre murs de  studettes des foyers français. Et, on ne saurait se passer des anecdotes et blagues de ce sexagénaire à l’humeur décapant si on veut narrer l’histoire de ce lieu.

De plus, l’âge avancé n’altère en rien la mémoire de cet homme sans cheveu blanc. Le téléviseur qui orne sa chambrette, capte une chaine sénégalaise. Les nouvelles qu’il rapporte le font voyager au pays de la Téranga (le fait de bien recevoir, surnom du Sénégal).

Flux et reflux, les souvenirs se bousculent dans sa mémoire. Le regard semble loin. Il pense à la famille restée au Fouta, localité du Sénégal située dans la vallée du Fleuve Sénégal. Mais, il esquive et fait semblant de s’épancher. Une histoire de frontières, de papiers, de droit de circuler et de vivre librement a jalonné son existence… Mais, l’histoire de Diouga Dabo ressemble fort à celle des quelques centaines d’âmes qui occupent les six étages du foyer d’Aftam de la Porte de Clichy. Réservoir des déçus de l’eldorado parisien.

La France à l’extérieur, l’Afrique à l’intérieur

On y accède par un portail en fer grand ouvert orné de larges grilles. De nuit, on ne distingue pas nettement sa couleur. A l’entrée, un jeune homme est pris au collet  par quatre gaillards qui lui demandent de restituer les papiers qu’il a pris la veille. Dans la cour, les derniers marchands trouvés sur place ramassent leurs étals, où des rangées de tables font office de gargotes. Où sommes-nous? On est à deux pas de la Place de Clichy, loin de la foule et de l’agitation, mais on se croirait en plein marché Sandaga, avec l’ambiance, les rythmes, les activités des marchands ambulants, qui font la singularité de ce lieu grouillant situé au centre-ville de Dakar. Bienvenue au foyer de l’Aftam (Association d’aide et d’accompagnement pour l’hébergement) des travailleurs de la Porte de Clichy situé dans le XVIIe arrondissement de Paris.

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Les locaux sont insalubres. D’épaisses couches de crasse ont eu raison du carrelage blanc. Les couloirs, aux néons blafards, sont mal éclairés. Partout, une forte odeur d’urine et d’humidité embaume les narines. De grosses toiles d’araignée ornent les murs décrépis. Portes défoncées, vitres cassées, qui pendouillent: ici les conditions d’existence sont dures, rudes et la dignité humaine semble ne pas y trouver toujours sa place. Une des raisons qui pourrait expliquer l’absence de femmes dans ce lieu. Mais les hommes semblent n’en avoir cure. Ici on converse à tue-tête, on s’esclaffe à gorge déployée et on rit aux larmes. La joie et la bonne humeur sont au rendez-vous même si la vie dans un foyer n’est pas des plus roses.

Dans l’atelier de couture, qui fait également office de Grand-Place (endroit où on a coutume de se retrouver pour discuter) se côtoient Sénégalais, Ivoiriens, Burkinabés et Maliens. Dans ce capharnaüm indescriptible, deux rangées étroites de tables se font face. Dans la salle, on peine à s’entendre. Le bruit infernal des machines fait concert avec les discussions de clients venus récupérer leurs coutures. Et on répond à peine aux salamalecs. Tous s’activent autour de la pédale. Au fond de la salle, une radio distille un vieux son d’Alioune Mbaye Nder. Au bon souvenir du pays! On discute et commente les dernières actualités du pays. Et certains ne manquent pas de s’offusquer de la dégradation des mœurs constatées de plus en plus chez les jeunes filles. Soudain, l’appel du muezzin à la prière du crépuscule interrompt le débat. On passe aux choses sérieuses. Très vite, la salle commence à se désemplir. Une  grande salle, aménagée au rez-de-chaussée, du bâtiment sert de mosquée.

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Dix minutes plus tard, retour à l’actualité. Même si la montée de l’extrême Droite fait quelque peu angoisser avec toutes les conséquences qui peuvent en découler, c’est plutôt  le sort des parents restés au pays qui préoccupe le plus.

 «Le pays est malade», s’indigne Alassane. Etabli en France depuis 11 ans, il travaille dans l’atelier de couture de l’Aftam Porte de Clichy, bien qu’il ait choisi de ne pas y vivre.
«Rien ne va au pays. Même se soigner est devenu un luxe, seuls les riches ont accès aux soins», râle-t-il.
Une tasse de Ataya en main (thé sénégalais) en main, Dahirou Ly, sans papiers, installé en France depuis 4 ans, explique que la situation est difficile au point qu’il ne peut même plus appeler la famille restée au village.

 

Slate Afrique

 

 

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