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Mokhsine Diouf, le vin, c’est sa passion

Rien ne prédestinait pourtant Mokhsine Diouf à se faire un nom dans le milieu. À Dakar, il organise des dégustations et compte bientôt ouvrir une cave.

Sur la terrasse arborée d’une épicerie fine dakaroise, à un jet de pierre du palais présidentiel, Mokhsine Diouf sert un château-laborde cuvée 2009, un haut-médoc « tout en finesse et en élégance » dont il vante « les tanins soyeux et les notes complexes de grillé de vanille et de fruits rouges ». Autour d’une assiette de fromage, les jeudis et vendredis soirs, ce passionné qui a écumé pendant vingt ans les vignobles français ressuscite à Dakar les moments de convivialité qui ont fait le succès du bar à vin qu’il animait France de 2003 à 2012 dans la région montpelliéraine.

Né il y a quarante-sept ans dans une famille sénégalaise musulmane de sept enfants, ce fils de diplomate part en France en 1989 pour y poursuivre ses études et choisit Montpellier « en raison du climat ». Dans l’arrière-pays, les vignobles s’étendent à perte de vue. À la recherche de petits boulots pour financer ses études de sociologie, il s’initie à la taille des vignes puis à la mise en bouteille. « C’est là que j’ai commencé à m’intéresser au vin », raconte ce « Sénégaulois » qui a conservé une pointe d’accent languedocien. À Agropolis, il reprend ses études et s’initie à la viticulture et à l’oenologie. En parallèle, il rallie un club de dégustation et affine son palais. « On se mettait à plusieurs pour acheter des grands crus qu’on allait ensuite déguster auprès de sommeliers réputés. »

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Une fois son BTS en poche, Mokhsine Diouf inaugure sa cave, en 2003. Depuis plusieurs mois déjà, dans sa petite 4L, il n’a cessé d’arpenter les vignobles de l’Hexagone à la recherche de perles rares, du Languedoc-Roussillon à l’Alsace en passant par le Bordelais. Face à ce caviste à la peau noire originaire d’un pays sans vignoble, les viticulteurs comprennent rapidement qu’ils n’ont pas affaire à un plaisantin. « Je faisais preuve d’un professionnalisme un peu exagéré, s’amuse l’intéressé. Avant la dégustation, je leur posais des questions sur les intrants utilisés, le nombre de labours et même la profondeur des racines. »

Le Sénégal consomme de 20 à 24 millions de bouteilles par an

Sa cave, qui se double d’un bar à vin convivial où alternent expositions et concerts, devient une référence dans la région. Quand sa mère vient lui rendre visite, elle constate, devant la terrasse engorgée, que son fils est parvenu à s’imposer : « Elle m’a dit : « C’est ton choix », et ne m’a ni encouragé ni découragé. » Neuf ans plus tard, Mokhsine Diouf finit par vendre son affaire. Des importateurs américains lui font un appel du pied, mais l’envie de rentrer au pays, après un quart de siècle d’exil, finit par l’emporter.

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Bien que peuplé à 90 % de musulmans, le Sénégal consomme, selon les estimations, de 20 à 24 millions de bouteilles par an. Mais pour ce qui est de la qualité, entre les vins importés en vrac et mis en bouteille dans le pays et les productions à bas prix reconstituées à partir de moût concentré de raisin déshydraté, les amateurs dakarois font grise mine.

Négociant pour des importateurs basés en Afrique de l’Ouest, consultant pour des hôtels et restaurants, Mokhsine Diouf participe également à une tentative expérimentale d’implantation de vigne sur la Petite Côte, au sud de Dakar. Avec l’ambition de créer un jour son propre vignoble à Saint-Louis, seule région du pays où les températures, au moment de la saison fraîche, sont de nature à créer le choc thermique dont la vigne a besoin après les vendanges.

Dans l’immédiat, il entend mettre sur pied une école de sommellerie destinée aux professionnels de la restauration. En attendant l’ouverture, prévue pour début 2015, de sa cave à vin, dont on peut présager qu’elle s’imposera pour la même raison qui avait fait son succès en France : « Je parle de mes vins comme de mes enfants. »

 

Jeune Afrique

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