Qui en veut au café littéraire de la rue de la Fontaine ? Depuis son ouverture en juillet 2018, M’Tiss est la cible de critiques et d’attaques « à caractère raciste ». Alors que sa propriétaire menace de dénoncer son bail, Jean Dib NDour se console du soutien de celles et ceux qui, aujourd’hui, forment « une grande famille ».
Et l’on reparle du café littéraire de la rue de la Fontaine. Depuis son ouverture, le 14 juillet 2018, ce lieu de vie messin est toujours sous le feu des critiques du voisinage. Le patron, Jean Dib NDour, est au bord du « dégoût ». Il y a quelques jours, de rage sans doute, il a posté une vidéo sur sa page Facebook. Une décision guidée par la goutte de trop.
« Je suis dans les règles »
« Depuis mon installation, on m’a soupçonné d’ouvrir un bar clandestin. J’ai dû enlever la hotte de la cuisine. Grâce à une cagnotte, les tests de nuisances sonores ont été faits. On a cassé mon boîtier électrique pour m’empêcher de lever mon rideau, on a posé une chaîne pour m’interdire l’accès au local poubelles, j’ai entendu des propos clairement racistes. J’ai déposé plainte contre X mais c’est resté sans suite. Aujourd’hui, un copropriétaire a fait appel à un avocat pour forcer ma propriétaire à dénoncer mon bail en date du 31 décembre. »
« Le M’Tiss, c’est ma famille »
Autant d’actes, mais aussi de paroles « incompréhensibles » aux yeux du Sénégalais qui, exemple d’intégration, a été récompensé de la médaille de l’Assemblée nationale pour avoir créé un lieu de vie multiculturel. Cafés philo, cafés langues, rencontres d’auteurs, dictée mensuelle, théâtre, poésie, repas solidaires, concerts… Le M’Tiss joue la carte de la mixité et de l’amitié.
« Je paie mon loyer, je n’ai rien à me reprocher. On s’attaque à mon être, à mon identité et à ma couleur de peau. Moi, je ne demande qu’une chose, que l’on me laisse travailler », souffle Jean Dib NDour. Cependant, grâce aux soutiens de « la grande famille qu’est devenu le M’Tiss », l’homme garde espoir.
« Pas d’excès notables »
« Ces attaques sont injustes. Ici, il n’y a jamais plus de bruit que de raison. Le M’Tiss est devenu mon petit QG de travail, j’y ai même révisé mon bac », témoigne Léa. « Je suis contente d’avoir trouvé ce petit café. Avec son ambiance et l’atmosphère, à l’heure où l’on a besoin de pluralité, c’est une vraie richesse », renchérit Anna-Maria. « Le M’Tiss est victime de l’ignorance ! La culture doit être un rempart pour vaincre la peur de l’autre », martèle Maryse qui, par deux fois, a participé au café poésie. En face, le pâtissier Robert Thiriot apporte également son soutien à Jean Dib NDour : « Je travaille ici depuis 1985. Des commerces, j’en ai vu ouvrir et fermer, mais jamais je n’ai vu une telle situation. C’est triste ! »
Côté municipalité, on ne constate pas « d’excès notables » de la part de ce café. « En termes de tranquillité publique, même si nous ne minimisons pas les nuisances causées par les bruits extérieurs, nous n’avons rien à reprocher au lieu. En tout cas, par rapport à d’autres, le M’Tiss est loin d’être le plus bruyant. Même si c’est une affaire privée entre un locataire, sa propriétaire et un copropriétaire, nous restons attentifs », confirme Sébastien Koenig, adjoint au maire en charge de la sécurité.
Le Republicain Lorrain