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Les défenseurs des migrants dénoncent l’«obsession» française de l’enfermement des étrangers

Les défenseurs des migrants dénoncent l’«obsession» française de l’enfermement des étrangers

Des centres de rétention qui prennent des allures de prisons, des privations de liberté mal encadrées : les défenseurs des migrants dénoncent l’«obsession» française de l’enfermement des étrangers, objet selon eux d’un «durcissement» qui s’affranchit du droit.

En quatre ans, la France a doublé ses capacités d’accueil en centres de rétention administrative (CRA), où sont enfermés les étrangers en situation irrégulière dans l’attente de leur expulsion.

Une multiplication des lieux d’enfermement qui s’accompagne d’un «durcissement aux frontières du droit», a résumé Paul Chiron, un responsable de l’Observatoire de l’enfermement des étrangers (OEE), lors d’une conférence lundi soir sur le sujet. Hasard du calendrier, le dernier-né des CRA a ouvert ses portes lundi 17 janvier, à Lyon.

Clôtures, barbelés: on assiste à une «“carcéralisation” des lieux de rétention», a observé pour sa part Olivier Clochard, géographe et membre du collectif Migreurop.

Tout, dans le fonctionnement de ces lieux, «rappelle les dispositifs carcéraux», a estimé ce spécialiste du sujet. Pour lui, le rallongement de la durée maximale de rétention, passée de 45 à 90 jours en vertu de la loi asile et immigration de 2018, «a conduit à banaliser ces modes d’enfermement» et permet «d’aller vers une forme de criminalisation de l’immigration».

«Obsession de l’enfermement»
Comme dans les prisons, où il existe des quartiers d’isolement, les CRA possèdent leurs cellules «d’enfermement dans l’enfermement», «un dispositif particulièrement peu encadré», a dénoncé lors de la conférence de l’OEE Maud Hoestlandt, directrice des affaires juridiques de la contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL).

«Un moment propice aux atteintes à la dignité et aux droits fondamentaux» de personnes enfermées pour leur seule situation administrative, a ajouté Maud Hoestlandt, en diffusant des photos de cellules dotées d’un simple matelas posé sur un bloc de béton carrelé et d’une toilette, «comme en garde à vue».

Dans une tribune publiée lundi sur le site internet de Libération, un collectif d’associatifs, d’intellectuels et de personnalités a également appelé à fermer les «zones d’attente» aux frontières, des lieux –comme il en existe par exemple à l’aéroport parisien de Roissy-Charles de Gaulle– où sont enfermés chaque année des milliers d’étrangers dans l’attente de leur renvoi ou de leur admission sur le territoire.

«Si les conditions d’entrée ou de séjour ne sont pas réunies, on trie, on enferme, on renvoie», énumèrent les signataires de la tribune, notamment portée par l’Anafé (Association nationale d’assistance aux frontières pour les étrangers).

«Par leurs pratiques, les autorités françaises violent quotidiennement les droits fondamentaux au nom d’une obsession de l’enfermement», ont-ils écrit. Objectif, selon les auteurs de la tribune: «Exciter les peurs et instiller dans l’opinion publique l’idée que les étrangers représenteraient un danger».

Aux frontières, en particulier à celle qui sépare la France de l’Italie, «le droit d’asile est rendu inaccessible par l’enfermement», a également déploré Judith Marcou, doctorante à l’EHESS, qui travaille sur la situation dans les locaux de la police aux frontières (Paf) de Menton (Alpes-Maritimes) et Montgenèvre (Hautes-Alpes).

Des personnes y sont «enfermées dans des constructions modulaires attenantes et privées de liberté en dehors de tout cadre légal», a assuré celle qui est également «observatrice» pour l’Anafé. Pour elle, si l’enfermement est systématique et problématique, une autre notion «prime sur tout» à nos frontières : «Le refoulement» hors de France.

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