Ce mardi 6 décembre 2022, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Caen a étudié la demande de remise en liberté de l’agresseur au katana à Cherbourg (Manche) en 2021.
Ce mardi 6 décembre 2022, la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Caen a refusé de remettre en liberté l’homme d’origine sénégalaise mis en cause dans l’attaque au katana survenue il y a tout juste un an à Cherbourg (Manche).
Le 2 décembre 2021, un homme avait en effet d’abord agressé une femme enceinte vers 15 heures, rue Malakoff, en la sommant de quitter sa Citroën C3 et de lui donner les clés sous la menace de son sabre japonais.
La « maladie du démon »
Cet homme de 35 ans avait ensuite pris la direction de Tourlaville où il avait stoppé sa course au magasin Leclerc en fonçant dans le totem des prix de la station essence.
Là, une patrouille de trois policiers du groupe de sécurité et proximité de Cherbourg était intervenue dans le cadre de ce car-jacking et avait constaté que la voiture était accidentée.
L’homme avait alors blessé deux policières – l’une au menton, l’autre au crâne – avec son sabre. Le troisième agent avait riposté en tirant sur lui avec son arme à feu à trois reprises et l’avait blessé à l’abdomen.
« Immobilisé au sol », l’assaillant avait continué de les « menacer de mort », vociférant qu’ils allaient « finir en enfer ». Dans son sac à dos avaient été trouvés d’autres armes blanches telles que des sabres, « des couteaux répartis dans deux sacs différents », une arbalète, un arc ou des nunchakus, a-t-il été énuméré ce mardi 6 décembre 2022 lors de l’audience publique de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Caen.
Le procureur de Cherbourg avait écarté toute motivation terroriste, mais l’affaire avait connu un retentissement national.
L’homme avait par la suite été héliporté au CHU de Caen où il avait été entendu par la police judiciaire. Il avait assuré se sentir « menacé », « en danger », « pris en chasse par un mouvement », mais leur avait assuré que « Dieu et ses apôtres allaient [le] sauver de la maladie du démon » dont il souffre depuis sa naissance.
Un « risque de fuite » au Sénégal
Le suspect n’avait par ailleurs ni bu d’alcool, ni pris de drogues, mais manifestait des « symptômes d’allure psychotique » selon les médecins. L’un des psychiatres qui l’avaient ausculté avait souligné sa « particularité ethnique » et ses « croyances liées à un maraboutage qui aurait eu lieu dans son enfance », au Sénégal.
Malgré tous ces éléments, l’état du prévenu avait été jugé « compatible » avec une mise en garde à vue. Celui-ci avait assuré qu’il « n’avait l’intention de tuer personne », mais qu’il était simplement « possédé par de nouveaux esprits ». Un autre expert psychiatrique et un autre expert psychologue avaient conclu à une « bouffée délirante à forte dimension onirique ».
D’un point de vue social, l’homme a été conducteur d’engins jusqu’en août 2021 et a travaillé dans la cuisine.
Ce fils « sérieux », « gentil » mais « influençable » s’était réfugié dans le cannabis pour tromper la « solitude », est convaincue sa mère restée au Sénégal. Une amie de cette dernière, qui lui avait rendu visite en France, avait d’ailleurs relevé son « regard fuyant » et son « corps amaigri ». Il lui avait alors confié « Ils sont là », alors qu’il vivait pourtant seul dans son appartement…
L’avocat de la femme à qui la voiture a été volée a indiqué pour sa part que sa cliente avait été « extrêmement choquée » par cet homme « très froid » et « très engagé ». Alors en « début de grossesse », elle a « peur de le croiser dans la rue ».
L’avocat général a tenu à « souligner la dangerosité » du prévenu et a demandé son maintien en détention provisoire : un expert estime qu’il « ne nécessitait pas d’hospitalisation », mais que « les soins étaient obligatoires ».
Aujourd’hui, la détention provisoire paraît être l’unique moyen de garantir sa représentation en justice vu qu’il risque de prendre la fuite au Sénégal où il conserve des liens étroits. Représentant du ministère public
Des « indices graves et concordants » ont été filmés par la vidéosurveillance du magasin Leclerc.
L’avocat du trentenaire avait pour sa part plaidé en faveur d’un « placement dans un établissement sanitaire » étant donné que son client a « besoin de soins » et qu’il « ne suit aucun traitement en maison d’arrêt » et « ne bénéficie d’aucun suivi médical ».
« Il ne faut pas prendre l’établissement pénitentiaire comme une annexe de l’hôpital psychiatrique », avait-il insisté.
La prison n’est « pas une annexe » de l’hôpital psychiatrique
Pour lui, laisser cet homme en détention provisoire serait comme vouloir « cacher le problème ».
« Or, il a besoin d’une assistance sérieuse et réelle et il n’y a rien », avait-il répété aux juges caennais. Le suspect avait par ailleurs assuré avoir « tiré un trait sur Cherbourg », où il ne retournera pas.
« Je n’irai pas voir les victimes, je veux mettre un point final à cette affaire et retourner chez ma mère », avait-il promis.
Mais les juges se sont finalement rangés aux réquisitions de l’avocat général et ont prolongé sa détention provisoire. Aucune date de procès n’est arrêtée à ce jour.
Avec La Presse de la Manche