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Tranches de « vie en foyer » de travailleurs immigrés

L’archétype du logement dit « immigré », c’est le foyer de travailleurs migrants, cette spécificité française construite pour héberger les travailleurs du Maghreb et d’Afrique noire dans les années 1960-1970.

Voici quelques ressentis du quotidien dans ce type d’habitat recueillis par Afriscope et Sekou Diallo chez les habitants d’un foyer rue Bisson, dans le 20e arrondissement de Paris.


foyer0Seydou, 29 ans :  » Au Foyer, de père en fils »

Les foyers ont été construits dans les années 1970 pour nos grands-pères et nos pères. Je suis en France depuis 2006 et je n’ai toujours pas trouvé un bon travail. Dans le foyer, tu peux rester deux ans sans salaire et vivre comme tout le monde parce que la famille ne te laissera jamais tomber. Chacun cotise pour aider celui qui n’a pas les moyens de payer le loyer. Sinon, on se retrouverait dans la rue. J’ai repris la chambre de mon père. Lui vit avec mon oncle, et moi avec deux cousins. Il va repartir au Sénégal dans quelques jours parce qu’il ne supporte plus de voir comment nous vivons. À son époque ils avaient un peu de moyens quand même et ils étaient moins nombreux. Aujourd’hui, nous sommes les uns sur les autres et avec la crise la vie est très difficile.


foyer4Moussa, 35 ans :  « La promiscuité, il faut s’y habituer »

Le foyer, c’est moins cher qu’un autre logement, mais la vie y est difficile. On a peu d’espace pour dormir. Nous sommes trois dans 20m², il y a un seul lit mais on installe des couvertures par terre. Le week-end, je voudrais me reposer mais c’est impossible, la porte d’entrée s’ouvre en permanence et les couloirs sont remplis de monde. Après c’est aussi agréable parce tu trouves toujours quelqu’un avec qui discuter. Mais si j’avais la possibilité de partir, je le ferais.

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foyer7Lassana, 19 ans : « Être jeune en foyer, c’est difficile »

J’habite ici depuis 2006. Je suis venu à l’âge de 12 ans pour rejoindre mon père et je vis toujours avec lui dans sa chambre. Être jeune dans un foyer, c’est vraiment difficile. Tu n’as aucune liberté. Avec le respect des anciens, tu dois faire attention à tous tes faits et gestes. Je voudrais partir et habiter seul. Mon logement idéal, ce serait un studio dont j’ai la clef, je pourrais sortir quand je veux. Nous sommes les uns sur les autres ici. Et puis en ce moment avec les travaux il faut attendre quatre heures pour aller aux toilettes, il y a mieux quand même !


foyer1Issa, 29 ans : « J’aime la vie collective en foyer »

Je ne vis pas dans ce foyer, j’habite en appartement avec mon oncle et mon père qui m’ont hébergé en arrivant en France. Je viens ici pour manger et je donne un coup de main à un ami qui travaille à la cuisine. Tous mes potes vivent ici. On se retrouve le soir pour discuter. Souvent je ne pars qu’à deux ou trois heures du matin. Même si tu n’as pas de potes au foyer tu rencontres toujours des gens avec qui tu peux partager beaucoup de choses. En fait, j’aimerais vivre dans un foyer parce qu’on a plus de libertés. Bien sûr il faut être responsable, marcher dans le droit chemin, travailler, mais le reste ne regarde que toi.

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foyer5Abdoulaye, 31 ans : « La solidarité du foyer me fait vivre »

J’habite depuis cinq ans ici. C’est très dur, je me sens en prison mais je n’ai pas le choix ; ma famille m’héberge. Je ne trouve pas de travail, ou juste pour un ou deux mois, alors comment pourrais-je me payer un loyer de 500 euros ? J’ai un petit boulot à la cuisine du foyer, c’est ce qui me fait tenir mais c’est vraiment compliqué, je regrette d’être venu en France. Tu es jeune, tu n’as pas de papiers, tu sors à peine de la cuisine du foyer, mais tu n’as pas d’autres choix.


foyer2Moussa, 45 ans : « Le foyer est le lieu de la communauté »

Je suis arrivé en 1990 dans ce foyer et j’y ai habité 14 ans. Aujourd’hui je partage un appartement dans le 15e arrondissement mais j’ai laissé mes affaires ici. Beaucoup de personnes, comme moi, n’habitent plus au foyer mais continuent de venir parce que dans notre culture, le foyer est le lieu de la communauté. On partage les mêmes problèmes, on a besoin d’être ensemble. Par contre, les logements sont trop petits. En ce moment il y a des travaux pour que toutes les chambres soient individuelles mais le loyer risque d’augmenter. Ça nous inquiète.


 

 

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