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Bilel B., tué à Asnières: quinze ans requis contre le sénégalais Moussa D., la défense demande l’acquittement

Moussa D. était jugé toute la semaine pour avoir tué Bilel B. d’une balle dans la tête, en septembre 2017, à Asnières-sur-Seine. Au terme d’un procès intense, durant lequel l’accusé a continué de crier son innocence, le verdict devrait être rendu dans la nuit.
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Après cinq jours d’un procès dense et parfois tendu, les jurés de la cour d’assises des Hauts-de-Seine se sont retirés en fin de journée, ce vendredi, pour trancher le sort de Moussa D., jugé pour le meurtre de Bilel B.. La victime est ce jeune homme tué à l’âge de 26 ans d’une balle dans la nuque, place Le-Vau, à Asnières-sur-Seine, le 20 septembre 2017.

Le délibéré promet d’être long tant les thèses développées par le parquet et la défense sont opposées. L’avocate générale, Céline Martini, a requis quinze années de réclusion pour cette «exécution», quand Me Yassine Bouzrou, conseil de Moussa D., demande l’acquittement. «L’enquête incomplète nourrit un énorme doute», estime-t-il.

Dans une longue plaidoirie argumentée, le pénaliste a démonté des investigations lacunaires. Les policiers auraient mené «une enquête bas de gamme parce que c’est un règlement de comptes de cité», s’indigne-t-il. «Une enquête partie sur une rumeur, la rumeur Moussa, et ça a suffi. Verrait-on ça dans une ville bourgeoise ?»

«La rumeur a été le point de départ de cette enquête difficile parce que dans ces quartiers, on ne parle pas, on ne balance surtout pas et le lien de confiance avec la police n’est pas simple. Alors la rumeur, oui. Mais les enquêteurs ont creusé et déroulé la bobine. Tout orientait vers Moussa D.», maintient l’avocate générale.

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Ce 20 septembre, son téléphone borne bien place Le-Vau. «Il l’éteint à 15h49, rappelle l’avocate générale. Deux heures plus tard, Bilel B. est mort, entre deux voitures.» Dès le soir des faits, le prénom Moussa est arrivé aux oreilles des enquêteurs comme étant celui du tireur.

Une habitante du quartier a vu «un grand Africain en tee-shirt blanc pointer son arme, bras tendu, comme en position de tir. Sur la photo de Moussa D. présentée par la police, elle a dit que ça pouvait correspondre. Un autre témoin anonyme a vu passer en courant un dénommé Moussa. Il a entendu Vas-y, barre-toi, Moussa. »

La suite d’une précédente agression ?
«Ah, le témoin anonyme. Lors de sa première audition, il dit n’avoir entendu aucun prénom. Après il cite Moussa !» s’emporte Me Bouzrou pour qui cet homme, dont on ne sait rien et qui a délivré un témoignage confus mercredi en visioconférence, «dit n’importe quoi» : «Et il cite les propos d’autres personnes. C’est retenu comme des éléments à charge contre mon client et on ne cherche même pas à savoir qui sont ces personnes ! Là, c’est du ouï-dire à un témoin anonyme.»

Bien d’autres témoins auraient dû être interrogés, selon l’avocat, qui en dénombre huit. Parmi eux, le compagnon et le fils d’une femme, dont le téléphone a échangé 58 messages avec celui de Bilel B. le matin du crime. «Peut-être qu’on aurait trouvé alors un autre mobile que l’agression de fin juillet», avance Me Yassine Bouzrou.

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Cette agression de fin juillet, l’avocate générale est «convaincue qu’elle a mené à l’issue tragique». Bilel B. avait été violemment agressée sur la place Le-Vau par au moins une dizaine de personnes, cinquante selon certains témoins : «Il a été très marqué, humilié, en plus la vidéo de l’agression a tourné sur les réseaux sociaux.»

C’est pourquoi le jeune homme serait revenu quelques semaines plus tard pour laver l’affront, armé, cagoulé, casqué. Et il a tiré vers un groupe de jeunes rassemblés près d’un poteau sur la place. «Je ne sais pas qui Bilel B. visait, si c’était un tir de sommation», concède Céline Martini. Mais ce qui est sûr, «c’est qu’il a été exécuté quelques secondes plus tard».

Après le crime, Moussa a disparu de la circulation. «Quelle urgence à quitter Asnières le soir même des faits pour aller au Havre et revenir trois semaines plus tard dans un appartement de planque à Gennevilliers, où on lui apportait ses repas et cigarettes ?» interroge l’avocate générale.

«Sa sœur habitait au Havre, il y avait des amis», balaye Me Bouzrou, dont le client ne serait «pas assez stupide» pour réserver des billets d’avion à son nom s’il était en cavale. Moussa D. avait été arrêté à Orly, quatre mois après le meurtre, alors qu’il allait embarquer pour le Sénégal.

Deux copains de Moussa D. ont également comparu devant la cour d’assises pour l’avoir «aidé dans sa fuite». L’avocate générale a requis entre huit et dix-huit mois de prison.

Par Valérie Mahaut 

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