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Le racisme en France: se sentir Français mais ne pas l’être pour les autres

RACISME – Les statistiques ethniques sont interdites en France. La couleur de peau, la religion, l' »ethnie » sont autant de critères en fonction desquels la loi française interdit de recenser ses citoyens.

Cela ne veut pas dire que l’immigration en France n’est pas étudiée. L’Institut National d’Études Démographiques (INED) publie les résultats d’une enquête passionnante sur la façon dont l’origine impacte la vie personnelle, familiale et le parcours scolaire et professionnel des personnes immigrées ou descendantes d’immigrés vivant en France métropolitaine.

Pour la première fois, l’INED ne s’est pas seulement intéressé aux discriminations que pouvait subir telle ou telle frange de la population mais aussi au degré de racisme ressenti par ces personnes. Les données ont été récoltées entre l’automne 2008 et février 2009. Le panorama offert par ce travail réalisé par 22 chercheurs bat en brèche certaines idées reçues et en conforte d’autres.

Les inégalités touchent toujours les mêmes personnes

Pour pouvoir comparer au mieux ces données, les chercheurs ne se sont pas seulement intéressés aux immigrés et descendants d’immigrés mais à la population dans son ensemble. Leur conclusion est sans appel: « Ce sont toujours les mêmes groupes qui apparaissent en situation de désavantage », assurent Cris Beauchemin, Christelle Hamel et Patrick Simon qui ont dirigé cet ouvrage.

Ainsi, les descendants de migrants du Maghreb, de Turquie ou d’Afrique subsaharienne ont plus de risques de n’obtenir aucune diplôme du secondaire. Ainsi, les immigrés en provenance de ces régions sont aussi plus souvent au chômage. Ce sont d’ailleurs ces mêmes personnes qui se sentent le plus victimes de discriminations dans le milieu professionnel. Cette partie de la population et plus largement les personnes issues d’une immigration hors de l’Europe « sont particulièrement concentrées dans les zones urbaines sensibles et l’habitat social ».

Les filles de parents immigrés s’en sortent mieux que les garçons

Les chercheurs ont aussi comparé la situation des enfants d’immigrés et celle de leurs parents. Si certains indicateurs montrent généralement une amélioration d’une génération à l’autre, les filles et les garçons ne sont pas logés à la même enseigne. Les premières voient leur situation s’améliorer en comparaison avec celle de leurs mères, les seconds occupent quant à eux « des situations inférieures » à celles de leur père.

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C’est à l’école que le bât blesse. Les difficultés rencontrées par les fils d’immigrés sont plus prononcées que celles des autres garçons de leur âge et que celles des filles d’immigrés. Ils ont statistiquement plus de risque de redoubler voire de sortir du système scolaire sans diplôme que les autres. « Tout se passe comme si l’institution scolaire ne produisait pas de désavantages liés à l’origine pour les filles, mais en créait pour les garçons ou se montrait dans l’incapacité de les juguler ». Les fils d’immigrés sont d’ailleurs bien conscients de cette discrimination puisqu’ils déclarent plus que les filles en être victimes.

Ce déséquilibre entre les filles et les garçons se renverse cependant au moment de l’accès à l’emploi. Comme dans le reste de la population, les femmes ont un taux d’emploi moins élevé que les hommes. Cependant, les filles de parents immigrés connaissent un taux d’inactivé plus élevé que le reste de la population féminine.

Le « racisme anti-blancs »? « Un phénomène minoritaire »

En étudiant l’ensemble de la population française, l’enquête TeO permet aussi de mesurer la perception du racisme ressenti par toutes les personnes vivant en France métropolitaine. Elle apporte ainsi un éclairage intéressant sur le « racisme anti-blanc », un « phénomène minoritaire ». Seuls 15% des personnes nées en France dont les deux parents étaient Français à la naissance disent en avoir été victimes contre plus de 50% pour les personnes originaires d’Afrique subsaharienne et du Maghreb ou leurs enfants.

De plus ce racisme ne se manifeste que dans la rue et non au travail, à l’école ou dans les administrations et ne dégrade pas leurs conditions de vie, comme c’est le cas pour les personnes issues d’une immigration hors de l’Europe ou leurs enfants.

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Se sentir Français mais ne pas l’être au regard des autres

Se sentir Français ou non. Les considérer comme Français ou non. Cette enquête interroge aussi ce que les chercheurs ont appelé la « francité » des personnes interrogées. La preuve que même après avoir acquis la nationalité française, on n’est pas forcément considéré comme tel par le reste de la population. Plus de 50% des immigrés originaires d’Afrique qui ont obtenu la nationalité française pensent qu’on ne les perçoit pas en tant que Français. Cette perception ne s’inverse pas dans les générations suivantes, elle peut même plutôt se confirmer.

Pour autant, cela va à l’encontre des idées reçues, les chercheurs ont mesuré une adhésion massive à l’identité française. Aux propositions « Je me sens chez moi en France », ou « Je me sens Français », une immense majorité répond « d’accord » ou « tout à fait d’accord » dans tous les groupes d’origine interrogés. Mieux encore, cette « francité » est très importante chez les personnes non naturalisées, 56% des étrangers vivants en France déclarent se sentir Français. Sans toutefois, oublier leur pays d’origine. « Les identités (entre le pays d’origine et la France NDLR) ne sont pas en concurrence mais se complètent », assurent encore les chercheurs.

Six ans après la collecte de ces informations, pas de doute, la situation a certainement évolué. L’INED l’assure, une telle enquête, si elle est rééditée, aura besoin des données de recensement de la population plus précises concernant les descendants d’immigrés. « On le voit avec le parcours des enfants originaires des DOM, être Français sur plusieurs générations n’empêche pas d’être en but au racisme et aux discriminations ». Couleur de peau, religion, appartenance à un groupe stigmatisé, autant de facteurs qui sont l’objet de discrimination mais ne sont pas mesurables aujourd’hui.

 

Source: Huffpost – INED

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