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Le prêtre sénégalais Alphonse Faye vicaire du curé de Saint-Amand (18)

Alphonse Faye vicaire du curé de Saint-Amand

Le prêtre Alphonse Faye a quitté Dakar pour s’installer dans le Saint-Amandois. Un déchirement autant qu’un acte de foi.

Depuis le 30 septembre, le curé de Saint-Amand Philippe Régnault de la Mothe a un nouvel assistant.

Alphonse Faye vient tout droit du Sénégal, où il a été le plus jeune curé du diocèse de Dakar.

À quarante-sept ans, le vicaire a accepté de s’installer dans le Berry pour trois ans.

Les deux curés prêchent dans les vingt-six villages des paroisses de Saint-Amand, Orval et Charenton.

Interview

C’est la première fois que vous exercez en Europe ?

Oui. La première fois que j’exerce en France, où je n’étais jusque-là venu qu’en vacances. Mes parents sont musulmans. Surtout ma mère, mon père étant plutôt tourné vers la religion traditionnelle de mon ethnie, les Sérères. Les parents d’à côté étaient chrétiens. J’allais à la messe avec leurs enfants.

Vous avez eu une vocation précoce ?

Oui, dès gamin, en CM1. J’ai grandi dans une religion musulmane très ouverte. L’islam au Sénégal n’est pas une religion fermée sur elle-même. Nous le devons au premier président du pays, Léopold Sédar Senghor, qui, avec sa négritude, était très ouvert au dialogue. Il est parvenu à créer une nation ouverte, une nation de dialogue.

Le chemin fut long pour devenir prêtre ?

Je suis allé au petit séminaire, ensuite j’ai intégré le lycée. Après le bac, j’ai suivi des études de philosophie pendant deux ans. J’ai quitté l’université pour faire mon grand séminaire pendant sept ans. Ma mère était un peu déçue. J’ai été ordonné prêtre en 2002, à la cathédrale de Dakar.

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C’était une fierté ?

Non, parce que la fierté est une émotion tournée vers soi. C’était plutôt une action de grâce. Devenir prêtre, je ne l’ai pas fait pour moi, mais pour les autres. En 2001, je suis allée suivre une licence de philosophie à l’université d’Afrique de l’Ouest à Abidjan (Côte d’Ivoire). Je suis tombé malade et n’ai pas pu la terminer. C’est à ce moment-là qu’on m’a demandé de venir ici.

Vous aviez le choix ?

Parmi les vœux, il y a celui d’obéissance.

Quitter votre pays n’a pas été une décision facile à prendre ?

J’étais partagé évidemment. J’ai dû quitter mes parents que je ne reverrai pas avant un an au moins. En même temps, il y a la joie d’aller donner le message évangélique là où ça commence à se perdre. C’est la France qui nous a évangélisés, alors si la France demande à être ré-évangélisée, c’est de bonne guerre.

Quelles différences y a-t-il entre le catholicisme sénégalais et sa pratique en France ?

Au Sénégal, la pratique catholique est plus joyeuse, plus vivante. Parfois, on danse à la messe. On tape sur le tam-tam, on joue de la guitare, de l’orgue… C’est moins frileux qu’ici. Le contenu de la liturgie est le même mais son expression diffère. En France, les jeunes ont déserté l’église, il ne reste que les vieilles personnes.

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Comment l’expliquez-vous ?

C’est surtout dû au développement de la science. À partir du siècle des Lumières, les gens se sont posé des questions existentielles au détriment de l’essentiel.

Qu’est-ce que l’essentiel ?

C’est qu’on ne peut pas vivre sans Dieu. Toute personne qui existe sans Dieu retourne à son état d’animalité.

Vous avez quarante-sept ans, mais je crois savoir que ce n’est pas votre âge officiel.

En effet. Quand j’ai eu l’âge d’aller à l’école à sept ans, malheureusement – ou heureusement –, il fallait donner un coup de main pour garder le bétail. Quand on a voulu me remettre à l’école, j’avais onze ans et c’était trop tard. Je n’avais plus l’âge. Alors mes parents ont dit que j’avais sept ans ! Si j’étais effectivement rentré à l’école à sept ans comme prévu, est-ce que j’aurais réussi ce que j’ai réussi ? Ce n’est pas sûr.

Qu’est-ce qui vous manque depuis que vous êtes dans le Berry ?

L’ambiance de Dakar, la nourriture, mes amis. C’est un déracinement, qu’on le veuille ou pas. Mais le Berry est un bon coin. Il y a des habitants très ouverts à notre couleur, nous les prêtres africains. Ce n’est pas partout le cas en Europe. Ici, je sens que ma couleur n’est pas un frein. Elle n’empêche pas l’évangélisation, la rencontre.

 

Source : Le Berry

 

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